Les députés ont voté cette nuit les mesures du gouvernement qui visent à étendre les dispositions réservées à la lutte contre les propos racistes aux propos homophobes et sexistes. Les amendements qui proposaient de limiter ces nouvelles dispositions ont finalement été rejetés.
Cette réforme, attendue depuis 1999, aura été accouchée dans la douleur. Sans relâche, durant ces 5 deniers jours, l’Inter-LGBT aura du adresser les plus sévères mises en garde au président de la République, au gouvernement et au président de l’UMP pour que les engagements pris successivement en 2002, en 2003 et en 2004 soient traduits dans les faits. Alors que certains articles du projet de loi ont été sauvés de justesse – les voix de l’opposition pour garantir que l’injure et la diffamation sexistes et homophobes seront pénalisés n’ont pas été de trop – l’Assemblée nationale aura été une nouvelle fois le théâtre de propos inacceptables :
– Christine Boutin, pour motiver le rejet de telles mesures, aura dû puiser directement dans les écrits du cardinal Ratzinger, qui dirige au Vatican la Congrégation pour la doctrine de la foi, en désignant un complot « queer » qui gangrènerait la totalité des lieux de pouvoirs, particulièrement les institutions internationales ;
– Christian Vanneste s’est quant à lui insurgé contre l’homosexualité qui mettrait en danger l’existence de l’humanité elle-même ;
– Marc Le Fur, Claude Goasguen et Jean-Paul Garraud auront pour leur part aligné mensonges et contre-vérités juridiques, sans oser assumer leurs intentions. Les votes successifs auront démontré qu’ils étaient suivis par une forte minorité de leurs collègues.
Ce débat laissera donc des traces indélébiles dans la confiance que les acteurs de la lutte contre l’homophobie et le sexisme peuvent accorder à la majorité. Il faut noter que c’est en donnant les garanties les plus fermes et définitives contre l’accès au mariage ou à la parentalité pour les couples de même sexe que le gouvernement aura fait avaler la pilule à sa propre majorité. Enfin, alors que le Sénat avait voté l’extension à tous les critères de discrimination de l’aménagement de la charge de la preuve au bénéfice des victimes, l’Assemblée nationale a restreint ce nouveau dispositif aux seules discriminations racistes.
Toutefois, le résultat est là : les propos sexistes et homophobes, à quelques détails de procédures près, seront traités à égalité avec les propos racistes. C’est donc soulagée que l’Inter-LGBT accueille le vote des députés de ce mardi soir.
L’Inter-LGBT note par ailleurs avec intérêt que, selon le président de la Commission des lois, la protection des personnes trans est garantie par les mesures contre les discriminations fondées sur le sexe. L’ajout du motif identité de genre parmi les motifs de discriminations prohibées reste toutefois nécessaire afin de solidifier une jurisprudence encore faible en France, et de reconnaître la discrimination transphobe dans sa singularité.
L’Inter-LGBT ne relâchera pas sa vigilance sur un texte encore améliorable, les navettes parlementaires n’étant pas terminées.
Enfin, le vote de hier soir était un préalable à la poursuite de discussion avec le gouvernement sur deux chantiers majeurs pour les associations de l’Inter-LGBT :
– l’effet pédagogique de la loi doit s’appuyer sur une mobilisation du monde éducatif et du monde du travail : pour l’Inter-LGBT, les mesures législatives votées hier soir était un préalable nécessaire, qui doivent déclencher une mobilisation de la société toute entière ;
– l’objectif à terme d’une réelle égalité quant à l’accès à la parentalité et au mariage n’est pas négociable : les discussions se poursuivront avec le gouvernement afin que la totalité des promesses faites par le gouvernement soient tenues, par l’organisation d’un débat national sur ces questions, comme le demandait le président de la République. « L’Égalité » sera d’ailleurs le thème de la Marche des fiertés lesbiennes, gaies, bi et trans pour son édition 2005.