LA PRISON NE SOIGNE PAS LE SIDA

LA PRISON NE SOIGNE PAS LE SIDA

LA JUSTICE S’OBSTINE A CONDAMNER LES
MALADES

Une fois de plus, un sropositif se voit condamn pour avoir
transmis le VIH lors de relations sexuelles non protges avec des partenaires
qui ignoraient son statut srologique. Alain Prosper a t condamn, vendredi 9
fvrier, par le tribunal de Cayenne (Guyane) 10 ans de prison ferme pour
atteinte sexuelle sur mineures et empoisonnement par transmission du
sida.

Une fois de plus, c’est le drame de la contamination par le
virus du sida qui est port devant les tribunaux. Depuis plusieurs annes, de
tels procs se succdent, enfonant chaque fois un peu plus le clou de la
stigmatisation des personnes atteintes, qui l’on semble vouloir s’acharner
attribuer la responsabilit exclusive de la prvention, et qui seules semblent
tre les responsables de ses checs. Echecs, qu’ici encore on identifie
travers la difficult rvler son statut srologique, ou adopter et
maintenir des comportements de prvention lorsqu’on est sropositif.

Bien entendu, nous ne pouvons que respecter le drame que
cela reprsente pour les plaignantEs, mais comment, nous, malades, pouvons- nous
admettre qu’un sropositif soit mis au banc des accuss pour n’avoir pas
surmont sa difficult assumer son statut srologique, ses implications pour
lui-mme et pour les autres et le regard d’une socit qui nous discrimine et
nous stigmatise tous les jours un peu plus ? Dans cette situation, o
l’exclusion frappe indistinctement touTEs ceux-celles dont le statut est connu,
comment accepter que l’on puisse faire un tri entre les malades – les coupables
et les victimes, touTEs atteintEs par le mme virus ? C’est encore plus
vrai en Guyane et dans les autres dpartements d’outre-mer, comme l’ont montr
les enqutes rcentes.

Cette affaire, une fois de plus, nous interroge sur la
perception du sida et sur ce qui fait que la peur et l’obscurantisme cdent la
responsabilit clairvoyante de personnes bien informes. Aprs avoir connu les
annes o la solidarit nous servait de rempart face la crainte de la mort,
comment peut-on accepter que l’on place la dsinvolture dans le camp de celles
et ceux qui sont atteintEs pendant que les autres, qui sont pargnEs,
voudraient croire qu’on peut vivre comme si le sida n’avait pas
exist ?

En voyant les manifestations mdiatiques de victoire qui ont
accompagn l’avnement de traitements efficaces on pouvait craindre que les
efforts dans le changement des comportements et l’adoption de mesures de
protection s’attnue. Ce sera donc pire : le sida est ce jour la seule
maladie dont on pnalise la transmission. Ceux qui voulaient un temps nous
enfermer dans des sidatoriums, qui n’ont pour seule arme de prvention que
l’abstinence et l’isolement des sropositifs seraient-ils en train de
s’imposer ? N’a-t-on pas assez dmontr quel point l’information et
l’accompagnement sont plus efficaces freiner l’tendue de l’pidmie ?
[1] Le seul dfaut de ces mesures est de requrir le courage politique et la
persvrance.

Une fois de plus, il semble que la culture de la peur et de
la rparation l’emporte face la solidarit et l’information. Une fois
encore, l’exclusion fait le jeu de l’pidmie. Ces procs ne conduiront qu’
inciter plus encore les sropositifVEs se cacher.

Alain Prosper est condamn. Stigmatis parce que
sropositif, non seulement on ne lui a pas accord la place laquelle tout
malade avait droit, mais on l’accable encore plus. Pendant ce temps, ceux qui
l’on doit l’inaction en matire d’information, de dveloppement de la
prvention, du dpistage et de l’accompagnement des personnes atteintes, de la
cration d’une vraie solidarit avec les malades, ceux-l courent
toujours.

En cette anne o il est donn aux politiques d’affirmer
leurs convictions et leur courage, Act Up-Paris attend des candidatEs
l’lection prsidentielle un engagement clair et sans dtour sur leur programme
pour lutter contre la discrimination, l’exclusion et la stigmatisation des
sropositifVEs.

[1] Voir l’avis du Conseil National du Sida sur la
pnalisation de la transmission sexuelle du VIH :