COMMUNIQUE
UNE CHARGE VIRALE
VIH INDECTECTABLE CERTES,
MAIS AUCUNE
CERTITUDE SUR L’ABSENCE DE VIRUS DANS LE SPERME !
Le Dr suisse Bernard Hirschel s’est
rcemment exprim sur le caractre non contaminant des personnes sropositives
avec une charge virale VIH indtectable. Depuis cette affirmation anime
actuellement le monde associatif et mdical. Interpell sur le terrain via ses
dlgus, le SNEG Prvention souhaite ici contribuer au dbat.
La position de Bernard Hirschel est
extrmement dangereuse en termes d’impact sur les comportements de
prvention, ce d’autant plus qu’il se base sur des tudes de couples
htrosexuels srodiffrents stables dont la sexualit ne correspond pas la
majorit des gays, qu’ils soient en couple ou pas.
Une gnralisation
dangereuse.
En passant de l’observation clinique
de rares cas de contamination chez des couples srodiffrents
htrosexuels stables et ferms un message de prvention gnralis, Bernard
Hirschel prend une position qui remet en cause toute l’approche de la prvention
en direction des personnes sropositives.
Un tel discours de sant publique ne
peut s’appliquer qu’aprs avoir lev un certain nombre d’incertitudes et de
questions bases sur des lments cliniques avrs et adapts tous les types
de sexualits, ce qui n’est pas le cas ici.
On ne peut ainsi prendre pour argent
comptant certaines de ses affirmations comme en dessous d’une certaine
concentration de virus, aucune contamination ne se produit ou encore
c’est une nouvelle option de prvention, qui est importante dans certaines
circonstances, par exemple chez les couples stables qui se connaissent bien,
chez les personnes qui veulent des enfants, l videmment c’est difficile
d’utiliser des prservatifs et le risque de contaminer quand on essaye de
concevoir pse lourdement sur la vie de couple, et l, par exemple c’est un
message qu’il faut donner aux gens .
.face un risque zro qui n’existe
pas.
Le risque zro n’existe pas et le
virus ne peut tre totalement radiqu. D’ailleurs, Bernard Hirschel se
contredit lui-mme puisqu’il reconnat qu’ il n’existe pas de certitude
absolue, ni de risque zro. Ce qu’on peut dire c’est que jusqu’ici, on n’a pas
constat de contamination partir d’un porteur du VIH sous traitement efficace.
On ne peut pas exclure que l’tude de cohortes plus importantes ferait
apparatre une exception ici ou l. Mais nous avons affaire une nouvelle
ralit, qui change les choses dans la pratique.
Ces exceptions ici ou l
qu’voque Bernard Hirschel, nous ne sommes pas prts les endosser en tant
qu’acteur de prvention responsable.
De mme, nous ne sommes pas prts
prendre le risque de nous taire en l’absence de vritables tudes de cohortes
protocolises et du mme coup faire prendre des risques majeurs nos amis,
nos partenaires, tous les hommes qui sont exposs par leur sexualit et dans
leur vie au risque VIH.
Nous refusons de faire le pari d’une
politique du nombre que nous considrons aussi dangereuse autant que contraire
l’thique et qui, ne prenant pas en compte dans sa communication la ralit de
nos pratiques, se fait au dtriment d’un discours de prvention sur le risque
individuel et unique pour chacun d’entre nous.
.face la ralit
biologique.
Sur un plan pratique, rappelons que le
seuil de dtection des tests actuels de mesure de charge virale sanguine est de
20, 40 ou 50 copies/ml de sang. Une charge virale est dite indtectable quand
elle est en dessous du seuil de dtection de la technique d’valuation utilise.
Attention, cela ne signifie pas qu’il
n’y a plus de VIH dans le sang, mais que l’on ne peut pas le dtecter. Ainsi,
pour un test dtectant jusqu’ 40 copies/ml, cela signifie que 39 virus VIH par
ml de sang peuvent tre prsents alors que le test rpond
indtectable . Cela ne veut pas dire par ailleurs, que le virus ait
disparu du sperme. Des rservoirs de virus persistent et les personnes restent
contaminantes.
Certaines tudes ont galement montr
que la charge virale sminale (dans le sperme) se situe entre 10 et 50 fois suprieure la charge virale sanguine, c’est le
cas par exemple en prsence d’infection sexuellement transmissible avec
inflammation des parties gnitales, anales ou buccales, et il est impossible de
prdire de faon certaine la charge virale sminale partir de la charge virale
sanguine.
Ainsi, un jaculat de sperme tant en
gnral de 2 4 ml, cela voudrait dire pour un homme dont la charge virale
sanguine VIH est « indtectable » (avec un test de sensibilit 40 copies/ml),
qu’un jaculat contiendrait entre 0 et 7800 virus VIH (4 ml x 39 copies/ml
x 50) !
La meilleure preuve scientifique qui
taye cette ralit se trouve dans les tudes mesurant la charge virale
spermatique chez des hommes sropositifs qui s’inscrivent en Procration
Mdicale Assiste en France, avec une charge virale plasmatique ngative sous
anti-rtroviraux, on retrouve une charge virale positive dans le sperme chez 7
17% de ces hommes.
. face des cas de contaminations non
publis.
Certes, la littrature n’a pas ce
jour publi de cas document d’une contamination avre par exemple, au sein
d’un couple homosexuel srodiscordant, dont le partenaire sropositif avait une
charge virale sanguine indtectable. Mais bon nombre de cliniciens ont t
amens connatre des cas prcis, mais, pourtant, la publication de tels cas
(qui ne semblait pas tre une priorit dans le corps mdical jusqu’ prsent),
ncessiterait d’liminer tout autre source de contamination extrieure pour tre
inconteste sur le plan scientifique. Et rien ne permet d’assurer
scientifiquement qu’un partenaire srongatif dans un couple srodiscordant ne
se protgeant pas, n’a pas pu tre contamin par un partenaire sexuel extrieur.
Ainsi, l’appui de tmoignage de mdecins partenaires du SNEG, nous pouvons ici
faire cas d’un couple sro-diffrent homosexuel suivi par le Dr Jean Derouineau,
de l’Institut Alfred Fournier et attach l’HEGP, qui est devenu
sro-concordant en 2007, partir du partenaire trait charge virale
indtectable vers son partenaire fixe. Ces partenaires avaient tous deux dcid
de ne pas utiliser de prservatif en informant leur mdecin, et ce sur la base
de connaissances et de leur valuation personnelle du risque de la transmission
du VIH en fonction de la charge virale… Le gnotypage du VIH infectant le
partenaire rcemment contamin montre un VIH identique celui de son partenaire
d’une part, et l’analyse de leur sexualit dans les mois prcdents d’autre part
confirme la transmission de ce virus au sein du couple. D’autres cliniciens
franais connaissent des situations comparables.
.et face des donnes non
transposable notre communaut.
Mme si un certain nombre de
publications fixent 1000 copies/ml de sperme le seuil en dessous duquel la
contamination serait impossible , la dose infectante minimale par voie
muqueuse chez l’homme est inconnue, faute d’tudes de cohortes, qui par ailleurs
poseraient des problmes thiques (comment en effet constituer des bras d’tudes
avec des personnes qui prendraient sciemment des risques de
contamination ?). En Afrique des tudes sur des couples htrosexuels
sro-diffrents , sur de courtes priodes (1 2 ans) ont montr la corrlation
entre contamination et charge virale VIH sanguine. De mme, d’autres tudes
similaires ont t menes sur des couples sro-diffrents en Espagne et au
Brsil mais l encore htrosexuels. Or, la situation est peu comparable avec
ce qui se passe de faon gnrale en termes de sexualit entre hommes et dans la
communaut gay.
.n’oublions pas les facteurs de
risques aggravants (virus VIH rsistants et autres IST).
La position de Bernard Hirschel
prcise que sa thorie s’applique des personnes sropositives ne souffrant
d’aucune autre Infection Sexuellement Transmissible (IST) et suivant un
traitement antirtroviral permettant de rendre la charge virale indtectable.
Cette hypothse s’applique
difficilement au milieu homosexuel o les alertes sanitaires nous interpellent
rgulirement. On ne peut donc faire fait fi de la question de la transmission
des IST (herps, chlamydiae, syphilis, LGV, gonocoque, papillomavirus, virus de
l’hpatite B, virus de l’hpatite C.), qui peuvent d’une part contribuer
l’augmentation de la charge virale VIH sminale et d’autre part fragiliser les
autres partenaires tant au niveau immunitaire qu’au niveau des muqueuses, et ce
quelque soit leur statut srologique. Un autre point important ne pas oublier
concerne la transmission du VHC par voie sexuelle, dont on a longtemps dit
qu ‘elle tait inexistante. Elle est dsormais avre chez les gays,
notamment sropositifs au VIH. On sait aujourd’hui que la gurison
par traitement d’un VHC d’un sous-type donn ne protge pas de la contamination
par un VHC d’un autre sous-type, et qu’une gurison d’un sous-type ne permet pas
de prdire une gurison avec un autre… Nous tenons aussi soulever la
question capitale de la surcontamination des personnes sropositives. Une charge
virale indtectable ne signifie pas l’absence de virus « sauvage », dnu de
rsistance. Il peut aussi s’agir de virus multi rsistants pour lesquels une
combinaison de mdicaments rcents modre la multiplication en dessous du seuil
de dtection actuel.
Contracter un VIH rsistant aux
mdicaments actuels, que l’on soit dj sropositif ou encore srongatif est un
vnement grave qui remet en cause la vie court
terme !
.et n’adaptons pas nos croyances des
vrits un peu trop vite tablies, qui demandent des confirmations scientifiques
prenant en compte toutes les sexualits.
Si nous convenons que la charge virale
faible diminue le risque de transmission de VIH sensible aux antirtroviraux
actuels, nous ne pouvons passer sous silence qu’il existe de nombreux VIH
diffrents et multi rsistants, hautement transmissibles. De ce fait, le risque
pour la sant est donc actuellement croissant, et non dcroissant, en cas
de rapport sexuel non protg, et cela mme au sein de couples homos
sro-diffrents stables.
Qui plus est, dans le cadre de
rencontres multiples, il est inimaginable de connatre la charge virale d’un
partenaire de passage ainsi que l’observance son traitement. Si le discours de
prvention n’arrive plus toucher certains gays, ce n’est pas une raison pour
diffuser des informations non tayes qui ne font qu’amplifier les difficults
de la prvention en permettant chacun de se forger sa propre croyance au gr
de ses fantasmes, de ses dsirs et de ses vulnrabilits du moment.
L’quipe prvention,
Antonio
Alexandre
Directeur National
Prvention