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Saccage

Son vrai prénom nous échappe, on sait seulement que ses amis l’ont baptisé Fraîcheur. Un garçon de 20 ans au torse minéral, aux mains patriciennes, au charme incroyable. Son corps est du meilleur bois pour enflammer la libido des hommes comme des femmes, jusqu’à sa pièce maîtresse : un cul d’une sensualité presque indécente. Fraîcheur désire ses amis qui le désirent aussi, mais rien n’est simple dans l’acceptation du désir homosexuel, aussi les 5 amis sont-ils unis par des liens homoérotiques d’autant plus forts qu’ils n’arrivent pas à passer à l’acte. La tension sexuelle est telle, qu’un jour, n’en pouvant plus, Fraîcheur quitte ses amis sans prévenir ni expliquer sa fuite.

Saccage est le récit d’une initiation aux plaisirs de l’amour entre hommes, une quête initiatique sur les aléas du refoulement et l’insoutenable attrait du défoulement. A force de prendre des femmes, Fraîcheur comprend l’irrésistible envie d’être à son tour possédé. Eric Jourdan décrit comme personne, avec finesse et doigté, cette envie du mâle d’être livré à la bestiale tendresse d’un partenaire d’une égale virilité. Ainsi ce passage après la lutte érotique entre François, le menuisier amoureux de Jeannine, et Fraîcheur : « Il avait réagi en homme et participé en homme à son propre viol, car il s’agissait d’un viol, certes non physique, ça n’avait aucun sens puisqu’il l’avait provoqué et réclamé, mais un viol moral. Un garçon s’offrant à un autre délibérément, c’était faire l’abandon de sa virilité. Non, ce n’était pas ça, il y avait le moment où François lui avait saisi la verge comme si c’était à lui, Fraîcheur avait senti cette rivalité, ce désir de s’emparer du sexe de l’autre, d’avoir son double prisonnier entre les mains. La possession n’existe pas. Vivre c’est aimer et aimer c’est jouir. Or ils avaient tous deux joui comme des fous. »

Saccage est bien plus qu’un roman érotique, c’est l’exploration de ce tabou ultime qui consiste à placer la sexualité des hommes sous le signe du plaisir anal. Depuis le « notre trou du cul est révolutionnaire » de Guy Hocquenghem jusqu’au « Sexe du Maître » de Jean Allouch, la sexologie contemporaine n’a cessé de creuser l’énigme de l’anus comme orgasme suprême. Sous la plume délicieusement lubrique d’Eric Jourdan, Fraîcheur devient l’incarnation même de cet hymne à la sodomie. A noter, page 77, lorsque Fraîcheur se laisse toucher par celle qui l’héberge dans sa fuite, le plus beau bouffage de cul de la littérature française : « Au-dessus d’elle les fesses s’ouvraient et elle y porta les paumes, les caressant, troublée de les voir si parfaites, puis ses doigts s’enhardirent comme s’ils devinaient que l’homme aussi se servait de ses mains pour ses plaisirs secrets. Elle se mit à lui enfoncer doucement l’index dans le cul et à la branler commun nouveau sexe ; bientôt ce fut sa bouche qui se posa sur cet oeil mystérieux. Elle le léchait encore et encore, l’anus s’ouvrait à peine sous sa langue, aussi lisse et doux que les naseaux d’un poulain. Puis elle sombra dans une nuit où l’odeur intime de Fraîcheur rejoignait celle de la campagne, des souvenirs d’été dans l’herbe, du rêve qu’elle avait fait, jeune fille, d’un satyre au visage d’ange et au corps méchant. »

Grâce aux éditions La Musardine, Saccage est pour la première fois publié dans sa version intégrale, non censurée. D’une saveur rare, d’une audace folle, ce roman s’impose d’emblée, entre Sade et Bataille, dans le panthéon de la grande littérature érotique. « 

Maxime Foerster

Saccage est l’histoire d’une initiation. Fraîcheur, jeune homme révolté et séduisant est attiré aussi bien par les hommes que par les femmes. Il sème le trouble parmi sa bande de copains et s’enfuit pour atterrir chez une bourgeoise de province, qui tombe sous le charme de sa jeunesse et de son innocence. Mais très rapidement, Fraîcheur se lasse de leurs échanges sexuels… Texte inclassable, intemporel et fulgurant, avec des scènes de sexe d’une tension rare, Saccage met en scène un personnage rimbaldien en quête de  » la jouissance avant toute chose « , dans tout ce qu’elle peut offrir de beau et douloureux. Une première version de ce livre, amputée des scènes érotiques (comme si l’amour physique pouvait être dissocié des pensées et des autres actes…) est parue à la fin des années 1950. Nous le publions aujourd’hui dans sa version intégrale.

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