Au cas où tu ne le saurais pas encore, un des événements les plus immanquables de cette rentrée, est sans doute la nuit de l’Electro Live , qui se déroulera le 20 Septembre au Bataclan. A cette occasion, sont attendues les prestations de 5 groupes electro live d’exception, dont les célèbres ONETWO. Et là tu te dis : « Il débloque, c’est la première fois que j’entends parler de ce groupe ». Ok on va dire que tu as un peu raison, mais si je te dis que derrière ce nom énygmatique, se cachent deux figures mythiques de la musique electro-pop et New-Wave isues des années 80, je te vois tout de suite redoubler d’attention … Alors voilà ! ONETWO, c’est tout simplement Paul Humphreys, un des deux membres fondateurs du groupe OMD (Orchestral Manoeuvres In The Dark), à qui on doit notamment les tubes « Secret » et « Enola Gay », et la magnifique Claudia Brücken, voix très particulière de Propaganda, responsable entre autres des hits « P Machinery », et « Doctor Mabuse ». Comment ces deux carrières de plus de 30 ans ont-elles évoluées ? Comment ces deux artistes se sont-ils retrouver pour créer une nouvelle entité musicale? Du haut de leurs expériences respectives, comment voient-ils la crise de l’industrie musicale actuelle? Ce sont les questions, parmi beaucoup d’autres, que j’ai eu l’occasion de leur poser …
Tof : Bonjour Claudia et Paul, je suis très honoré du fait que vous ayiez accepté de répondre à mes questions. Si j’ai bien compris, votre groupe ONETWO est resté sans nom pendant 4 ans, à partir de sa création en 2000. Est-ce que cela signifie que vous n’avez pas pris tout de suite votre collaboration au sérieux ?
Paul Humphreys : En fait ONETWO a commencé un peu comme une expérience. Durant quelques années, Claudia et moi avions écrit quelques chansons, puis nous avons joué ensemble aux Etats-Unis en 2000 au moment j’ai fait une tournée avec les chansons d’OMD. Je l’ai invité à venir avec moi comme chanteuse « guest »
Claudia Brücken : Oui, on a joué quelques titres de Propaganda aussi. Ca a été l’occasion de réaliser qu’on pouvait, qu’on devait même en fait, former un groupe. En 2004, notre expérience a commencé avec la sortie d’un EP 5 Titres, intitulé « Item », en vente uniquement sur e bay. On en a très rapidement vendu quelques milliers de copies et c’est à ce moment précis que nous avons réalisé qu’il y avait un intérêt pour ce que notre travail commun et que nous pouvions être un groupe viable.
Paul Humphreys : C’est toujours difficile de trouver un nom pour une formation. Nous, on a choisi le ONETWO pour sa simplicité. A mon sens, Claudia a eu le meilleur nom de groupe jamais trouvé avec Propaganda. et apres m’être illustré d’Orchestral Manoeuvres in the Dark, un nom si long et si ridicule, ONETWO m’a paru tellement simple !
Tof : De quelle manière vous êtes-vous rencontrés? Vous ne vous étiez jamais croisés à l’époque où vous évoluiez chacun au sein de vos groupes respectifs OMD et Propaganda ?
Paul Humphreys : Il me semble que nous nous sommes vus la première fois en 1985, à un festival Greenpeace à Rotterdam, auquel participaient OMD, INXS et Propaganda. On s’est croisés brièvement backstage mais je crois que Claudia était trop occupée à draguer Michael Hutchence pour me parler! En fait c’est vraiment en 1995 qu’on s’est rencontrés plus sérieusement. A l’époque je dirigeais un label indépendant à Liverpool [qui signa China Crisis et Listenning Pool, le groupe « dissident d’OMD » ; Ndlr] et j’ai dû me rendre au Music Bizz Festival de Cannes pour négocier des contrats pour mes groupes. J’y ai rencontré un gars de Logic Records, un label allemand, qui cherchait des co-auteurs pour travailler avec Claudia pour un album solo à sortir sur leur label. Cet album ne s’est jamais fait car Claudia a décidé de retravailler avec Propaganda, mais on a quand même continué à écrire ensemble.
Tof: Comment décririez-vous le son de ONETWO, comparé à celui d’OMD et Propaganda ?
Claudia Brücken : En fait je pense que nous avons trouvé un bon équilibre entre le son de nos 2 groupes, parce que ma voix est assez distincte et reconnaissable, et Paul a une signature assez personnelle dans la façon dont il compose. Il me semble que ces caractéristiques font définitivement partie de nous et seront toujours présentes dans nos réalisations. On a tout de même essayé d’ajouter un 3ème élément, en apportant nos sons et influences personnels de manière à créer un format qui sonne moderne, totalement 21eme siècle…
Tof : Pourquoi avoir choisi le titre « Instead » ?
Paul Humphreys : C’est assez ambigu, ca implique que nous offrons une alternative aux choses..; ce que nous essayons de faire !
Tof : Ok, et quelle est la signification de l’artwork de l’album, tout en hiéroglyphes? Est-ce que c’est un code ?
Claudia Brücken : Tout à fait! Un symbole est attribué à chaque chanson, et même au groupe et à l’album. Paul Morley, le journaliste et fondateur de ZTT (label de Propaganda entre autres; ndrl) avait créé ce concept pour les pochettes de ses artistes. Nous avons essayé d’ajouter une petite touche rappelant ces fantastiques visuels dans notre propre imagerie. Il faut aussi dire que je me suis toujours inspirée de ce que faisait Mr Morley pour mes propres réalisations et que j’ai voulu une continuité avec ONETWO.
Tof : Avec ONETWO, pouvez-vous vous permettre des choses, aussi bien au niveau du son que des textes, qui vous auraient semblé impensables au sein de vos deux groupes originaux ?
Paul Humphreys : Je trouve que ONETWO nous offre une toute nouvelle palette de sons et d’idées, ce qui est très libérateur. Quand j’écris pour OMD par exemple, il y a des attentes en terme de son ou de style auxquels on doit coller, pour ne pas destabiliser le public. Avec ONETWO, on n’est libérés de tous bagages !
Tof : Revenons à l’album « Instead », il contient notamment une reprise de « Have a Cigar », du Pink Floyd. Pourquoi cette chanson et pourquoi ce groupe en particulier ?
Claudia Brücken : On s’est juste amusés en fait. L’idée de faire cette reprise et d’enchaîner avec I Don’t Blame You (reprise de Cat Power), c’était un peu pour se moquer du coté « corporate » de l’industrie musicale… « Have a Cigar », c’était le Pink Floyd, se moquant des patrons des années 70, assis dans leur tour d’ivoire, tellement éloignés de la musique et des groupes qui la faisaient … L’ironie est qu’en 2008, ce coté « corporate » de l’industrie n’a pas beaucoup changé. Tout ce qu’ils essaient de faire, c’est s’accrocher à un modèle économique qui ne fonctionne plus. « I Don’t Blame you » des Cat Power, traite quant à elle, plus du mal fait aux artistes, à un degré plus profond. En fait cette chanson parle vraiment de la vie tragique de Kurt Cobain.
Tof : Les arrangements de « Instead » sont très sensuels, très chill out. Je dirais qu’ils évoquent certains titres de ATB, Pink Floyd, Everything but the Girl (surtout Home) ou même certaines atmosphères cinématographiques, dans le style Craig Armstrong. Que pensez-vous de ces rapprochements ? Etes-vous plutôt un groupe zen ?
Paul Humphreys : Je ne pense que l’on soit un groupe « zen ». D’ailleurs notre prochain album sera plus énergique et industriel. En fait chaque disque reflète vraiment l’humeur de l’artiste au moment où il le fait, un peu comme un instantané. Il faut croire que nous étions assez relax, qui sait ? Mais la question de savoir si un titre doit être rapide ou lent, hard ou soft, ça ne me paraît pas très important. Ce qui compte avant tout, c’est de véhiculer une idée, un sujet, une humeur ou une atmosphère. Le prochain opus se rapprochera probablement plus de notre son live. On a fait beaucoup de concerts l’année dernière, soit avec notre propre tournée, soit en première partie d’Erasure en Angleterre et en Europe, puis avec Human League. Jouer beaucoup en live nous a vraiment aidé à définir ce qu’est ONETWO. On a définitivement plus de caractère sur scène et on souhaite vraiment que ca se reflète sur CD.
Tof : Quels thèmes abordez-vous ici. Pensez-vous avoir atteint un certain degré de mâturité ?
Claudia Brücken : On a couvert une assez grande variété de sujets sur cet album : l’amour, le suicide, des théories sur le sens de la vie, sur les signaux radios ou TV que nous envoyons dans l’espace depuis le siècle dernier, sur l’industrie du disque…….etc. etc. Absolument tout peut être abordé avec nous. Dans Propaganda, The Act ou mes albums solo, j’ai toujours essayé de varier les sujets. Paul, au sein d’OMD, a écrit au sujet des bombes atomiques, de personnages d’histoire, ou même de la génétique… Ca se retrouve donc évidemment dans les préoccupations de ONETWO. A mon avis en tant que songwriter on évolue et on devient mâture avec le temps. On comprend mieux ce qui fonctionne, comment ca fonctionne et comment dire les choses simplement tout en véhiculant des thèmes larges.
Tof : Claudia, à l’époque de « Duel », « P Machinery » et « Doctor Mabuse », avec vos vidéos inquiétantes en noir et blanc, j’avais tendance à considérer Propaganda, comme un équivalent de Depeche Mode, mais avec une voix féminine. qu’en penses-tu ? Tu sembles attachée à un certain style « Dark », est-ce que c’est parce que tu trouves la mélancolie et les idées noires plus inspirantes ?
Claudia Brücken : Nous n’avons jamais cherché à être une version féminine de Depeche Mode, même si bien sûr, nous avons toujours été plus attirés par le coté obscur de la pop électronique plutôt que sa face « brillante ». En terme d’image, la règle N°1 que nous nous étions imposées avec Suzanne, était de ne jamais sourire, de n’être jamais trop chaleureuses, et de toujours rester distantes. Ce genre d’attitude transparaissait sur nos pochettes, sur les photos ou vidéos. Une part de Propaganda était un peu Punk et rebelle à cette époque. Pour ma part, j’étais fascinée par le Film Noir, l’Allemagne des années 20, le Dada et le surréalisme.
Tof : Vos parcours respectifs ne vous ont jamais fait de cadeaux. Je pense en particulier aux problèmes que Claudia a rencontré avec ses différentes maisons de disques. Peux-tu revenir dessus et me dire ce que cette expérience t’a apporté. Avec le recul, que penses-tu des difficultés de l’industrie musicale aujourd’hui ? Dans quel cas un artiste peut-il jouir du meilleur confort? En s’autoproduisant, en signant chez une major, un label indépendant, en diffusant sa musique exclusivement sur le web ?
Paul Humphreys : Toutes ces questions doivent être abordées ensemble car elles très importantes pour nous. Il se trouve que l’industrie du disque, au sens traditionnel, a été mise à genoux, et que la musique semble avoir perdu toute sa valeur monétaire. Le téléchargement illégal a fait perdre des milliards et les effets sont évidents. Hélas, beaucoup croient qu’il n’y a pas à payer pour des chansons qu’on écoute et qu’on aime . Ils disent : « Pourquoi payer quand on peut se les procurer gratuitement ? ». Quand tu es ches toi à télécharger, ce n’est pas comme si tu t’enfuyais en courant avc un CD sous le bras avec l’alarme du magasin qui sonne et un vigile qui te court après. mais c’est pourtant la même chose. En fait les musiciens devraient avoir le même droit de gagner leur vie en travaillant, que les fermiers qui font pousser des pommes de terre ou qui produisent du vin. Eux aussi ont des crédits, et des enfants qui ont besoin de chaussures neuves !!! Tout ca a vraiment tué notre métier tel qu’on le connaissait. Aujourd’hui, les labels traditionnels n’ont plus de fonds pour oser, risquer, et signer de nouveaux artistes avec du potentiel, du talent et qui n’ont besoin que d’etre entourés et développés. Tout se résume à produire industriellement quelques artistes, dépenser beaucoup d’argent pour eux et avoir un retour sur inverstissement aussi gros que possible des la première production. Si ça ne marche pas, on les laisse tomber et on passe au suivant. c’est horrible ! Maintenat apres avoir dit TOUT ca, parlons du coté positif, car IL Y A un coté positif. Cette technologie a permis de court-circuiter les labels et de promouvoir leurs album tout seul en utilisant des magasins online (iTunes etc…), ainsi que des endroit de promotion, comme myspace et facebook. Du coup les artistes, en un sens, sont plus libres, mais ils sont seuls, sans guide ou sans support financier. J’ai peur qu’avec ce système, les artistes ne deviennent que semi professionnels, car ils ont besoin d’un travail pour nourrir leur famille et financer leur ouvre. En plus, les maisons de disques ont fait office de filtre artistique, rejetant les musiciens qui avaient peut-être les meilleures intentions, mais qui étaient tout de même les plus dénués de talent. Avec des sites comme Myspace ou autres, tu dois maintenant faire le tri tout seul pour trouver les bonnes choses !!
Pour des artistes comme nous, ce climat est vraiment excellent, vraiment. Le fait d’avoir gagné de l’argent auparavant, a créé notre propre soutien financier et nous avons le contrôle total sur notre tavail et notre promotion sans avoir besoin de faire appel à un label traditionnel. C’est un avantage unique comparé à un groupe qui débute et n’arrive pas à dégoter de contrat avec une maison de disque. Beaucoup de gens nous connaissent Claudia et moi, et se montrent toujours interessés par notre actualité. C’est un autre son de cloches pour un nouveau groupe, car de toute évidence, personne ne le connait assez pour rechercher une quelconque news à son sujet.
Tof : En plus de sa participationà l’album d’Andy Bell en 2005, Claudia a chanté il y a peu de temps à un concert de Heaven 17… Gardez-vous le contact avec les autres groupes des années 80, et vous sentez-vous nostalgiques par rapport à cette période ?
Claudia Brücken : Personnellement, je ne me sens pas nostalgique, mais quand bien sûr lorsque je croise des artistes de cette époque, je me sens, pour des raisons évidentes, très proches d’eux. Quand Glenn Gregory m’a invitée à chanter « Temptation » pour le concert hommage a Billy McKenzie, j’étais touchée qu’il me le demande, j’aimais beaucoup Heaven 17 et the Associates.
Paul Humphreys : Même si tout le monde est très occupé, on arrive à trouver du temps pour se voir. Par exemple, on connaît et on est amis avec les gars de Heaven 17, Simple Minds, Depeche Mode, China Crisis. Rien que l’année dernière, nous n’avons tourné avec Erasure et The Human League ! Nous, ainsi que les groupes cités, ne sommes pas particulierement nostalgiques des 80’s, mais on regarde toujours derrière avec une certaine affection.. après tout, nous nous sommes tous construits pendant ces années et c’était une époque particulierement bonne pour l’écriture et l’histoire de la musique populaire. je le pense en tout cas. Personnellement je regrette surtout les cheveux que j’avais sur la tête !
Tof : Paul, lorsque j’ai interviewé Andy Bell (Erasure) en 2005, pour son album solo auquel participait Claudia, il m’avait dit que sa voix était comparable à celle de Marlène Dietrich. Est-ce que c’est aussi ton avis ?
Paul Humphreys : Je suis totalement d’accord avec Andy sur ce coup ! Andy et moi avons parlé plus d’une fois de ca et il y a vraiment chose que nous avons en commun : nous sommes tous les deux des fans IMMENSES de la voix de Claudia !!!
Tof : Revenons à l’album « Instead » de ONETWO. Il comprend une chanson en langue allemande « Kein Anschluss ». De quoi parle ce titre ?
Claudia Brücken : A la base, c’est l’histoire brève de quelqu’un qui attend un coup de téléphone venant de très loin, et qui ne vient jamais.
Tof : La langue allemande était également utilisée dans Propaganda. Pourquoi choisit-on d’interpréter une chanson en allemand, plutôt qu’en anglais ?
Claudia Brücken : J’ai toujours beaucoup aimé ma langue maternelle, qui peut etre si poétique et lyrique à la fois. J’adorais chanter du Marlene Dietrich et Lotte Lenya ainsi que toute la musique écrite par Kurt Weill et Bertolt Brecht. Ensuite, des groupes comme Kraftwerk, Can, Klaus Nomi, et toute la New Wave allemande, ont une forte influence sur moi. Parfois donc, quand l’humeur m’en prend, je retourne à ces racines allemandes.
Tof : Comment est venue l’idée de faire participer Martin L.Gore (Depeche Mode) au titre « Cloud Nine » ?
Claudia Brücken : Il y a maintenant quelques années, j’ai commence à écrire cette chanson à la guitare. J’avais une mélodie, un couplet, des paroles, mais j’étais bloquée avec ce titre et j’avais besoin d’aide pour le finir. Il s’avère que Martin, qui était mon voisin, était chez lui, et avait du temps libre. Je lui ai joué la chanson et lui ai demandé de m’aider. Il m’a dit qu’il n’avait jamais co-écrit de chanson avant mais je l’ai encouragé en lui disant de ne pas s’inquiéter si ca ne marche pas. Incroyablement, il m’a appelé 2 jours après pour me dire que c’était bouclé. C’était une expérience trés sympa et une collaboration fantastique.
Tof : Cette chanson commence avec une ligne de synthé, qui rappelle Kraftwerk. Font-ils partie de vos plus grandes influences ? D’après vous, qu’ont-ils apporté au monde de la musique ?
Paul Humphreys : Indubitablement, les Kraftwerk SONT les grands parents de la pop électronique. Je dois certainement ma carrière au simple fait d’avoir entendu le titre « Autobahn » à la radio en 1975. A ce moment précis je me souviens que je me suis dit : « C’EST le futur et C’EST ce que je veux faire. Je vais faire de la musique électronique » . Claudia n’en a pas fait mention, mais « Kein Anschluss », est également une sorte d’hommage au quatuor allemand !
Tof : Claudia, la reformation de Propaganda avait été annoncée en 1999, et avait été suivi de la diffusion sur le web de 9 démos, puis plus rien … Y a-t-il une chance que ce projet reface surface un jour ?
Claudia Brücken : Cela a toujours un « voux secret » [« Secret Wish » était le titre du 1er album mythique de Propaganda; ndlr] pour moi de refaire un album de Popaganda et j’ai toujours été convaincue qu’on aurait pu faire des choses tres belles ensemble. C’est triste de voir comment le groupe s’est arrêté si brutalement; Mais nous sommes à nouveau en bons termes, ce qui est un bon début, et je suis optimiste sur le fait qu’il en ressorte quelque chose.
Tof : La biographie de Propaganda révèle que le groupe s’est séparé à cause d’un conflit financier avec son label londonnien ZTT. Peux-tu m’en dire plus ?
Claudia Brücken : Tristement, le groupe a signé un trés mauvais contrat au début des 80’s, ce qui a fait que malgré le gros succès de l’album, on n’a pas gagné d’argent. Les coûts de production avaient été énormes. En conséquence, et ca se comprend, cela a créé des tensions avec la maison de disques. Quand nous sommes arrivés au terme du contrat, on nous a proposé de meilleures conditions mais la majorité du groupe pensait qu’il était temps d’aller chercher un meilleur deal ailleurs. Moi j’ai décidé de rester sur ZTT pour travailler à nouveau avec steve Lipson sur le projet The Act. Je me sentais vraiment à la maison chez ZTT à cette époque. J’aimais travailler avec Paul Morley, qui avait des idées marketing & conceptuelles fabuleuses; quand les autres sont partis [« 1.2.3.4 », un 2nd album pop insipide est paru sous le nom de Propaganda chez Virgin, mais avec seulement un membre du groupe d’origine et qui n’avait de rapport avec Propaganda que le nom; ndlr], j’ai négocié un contrat juste pour moi.
Tof : Le projet de reformation n’a-t-il pas eu de suite, parce que l’énergie et la volonté de vous imposer étaient perdues ?
Claudia Brücken : Oui certainement. Tristement, le groupe a toujours considéré mon mariage avec Paul Morley comme une menace. Il ne voyait pas comme un directeur artistique typique. Paul était plutôt un artiste lui-même et je me souviens à quel point il était passionné pour défendre les artistes quand il y avait des conflits avec le Label. Hélas, les autres ne le voyaient pas ainsi. Alors ca a toujours été une guerre perdue entre moi et les 3 autres. Nous n’avions pas vraiment non plus de vrai manager. Si nous en avions eu un, je pense que le groupe aurait continué.
Tof : En 2005, tu as participé à deux chansons sur l’album Electric Blue d’Andy Bell (Erasure), que j’avais d’ailleurs interviewé à cette occasion. Quel souvenir gardes-tu de cette expérience ?
Claudia Brücken : Que de bons souvenirs ! Andy fait partie de ces gens très spéciaux qu’on ne rencontre que rarement. Il a un Coeur en or ! L’année dernière nous avons eu le plaisir d’être les Special Guest de la tournée européenne et UK d’Erasure. haque soir il a fait preuve d’un soutien sans faille et veillait à ce que tout se passe bien pour nous. Je suis heureuse qu’il nous ai demandé de les accompagner sur la route. C’était une opportunité fabuleuse de présenter ONETWO au public. Faire « Delicious » et « Love oneself » avec lui fut un grand moment. J’aime vraiment ces deux chansons. On a fait quelques showcases en Angleterre ensemble et partager la scène avec Andy était fantastique. C’est une telle star !
Tof : Paul, comment se fait-il qu’OMD n’ait pas participé au fameux concert du Live Aid en 1985 ?
Paul Humphreys : Tout simplement parce que nous avions un engagement contractuel pour une tournée au Canada, pris avant que le Live Aid ne soit prévu et on n’a pas pu en sortir. On a fait malgré tout quelques récoltes de fonds. Sur un jour Off, Andy (Mc Cluskey, l’autre membre fondateur d’OMD; ndlr) et moi sommes allés à Los Angeles pour un Show TV avec Bob Geldof, Olivia Newton John et Quincy Jones…!!! C’était surréaliste!
Tof : Après plus de 20 ans de carrière, quel est ton meilleur souvenir de concert ?
Paul Humphreys : J’ai joué énormément de concerts en 30 ans ! mais celui du Pasadena Rose Bowl, à Los Angeles était certainement le meilleur. C’était l’été (18 Juin 1988; ndlr), avec Depeche Mode [concert que l’on retrouve sur leur live et film « 101 » réalisé par DA Pennebaker; ndlr], OMD and Thomas Dolby [… et les cultissimes Wire; ndlr]. Nous jouions juste avant Depeche Mode, juste avant la tombée de la nuit, et à ce moment il devait y avoir 80 000 personnes en liesse. A cette époque, notre titre « If you Leave » était N° 2 aux USA. Quand nous sommes montés sur scene, il y avait une rumeur énorme que je n’oublierai jamais, tout le monde était devenu fou !!! Le soleil se couchait mais tu pouvais voir les 80 000 personnes en face de toi.. Quel buzz !
Tof : OMD a une image plutôt sage, loin du Sex, Drug and Rock ‘N Roll … Est-ce que ça correspond vraiment à la réalité ? As-tu des anecdotes croustillantes à me raconter, sur des situations où vous avez été particulièrement sauvages, exhubérants, ou arrogants ?
Paul Humphreys : OMD n’a pas toujours été ce à quoi il ressemblait.. Je pourrais te raconter des histoires..mais le reste du groupe me tuerait !!!
Tof : Comment expliques tu que le groupe n’ait jamais réellement souffert de la mauvaise image habituelle de la plupart des groupes de new-wave qui utilisaient beaucoup le synthétiseur, l’image et le vidéo-clip comme mode d’expression (le mouvement New Romantic par exemple) .
Paul Humphreys : Andy et moi avons toujours essayé de rester éloignés de cette image globale de new romantic. On peut dire que nous avons même développé une anti-image pour combattre cela. On a choisi de s’ habiller comme des employés de banque conservateurs, avec des chemises très simples, des cravates et des pulls sans manche. Cependant, c’était intéressant de voir que que très peu de temps après que nous ayons participé au Top of the Pops habillés comme ça, un bon nombre de notre public soit venu à nos concerts habillés de la même façon !!! Notre anti-image était devenue notre image ! Ce n’était pas du tout ce que nous avions à l’esprit !!!
Tof : Sur l’album de ONETWO, tu ne chantes que sur un seul et unique titre « I Don’t blame You ». Déjà avec OMD, on n’entendait pas souvent ta voix. Est-ce que ça correspond à une volonté de ta part, de te mettre en retrait ?
Paul Humphreys : Honnêtement j’ai toujours été un chanteur réticent. Et puis étant dans un groupe avec Claudia qui, a mes yeux, a une des plus grandes voix pop de ma génération, pourquoi je chanterais ??? Nous pensons tous les deux que quand on fait une reprise, on doit faire que la chanson soit sienne propres et la rendre aussi différente que possible, sinon cela revient à du karaoké. Ainsi pour rendre la musique radicalement différente, nous avons également décidé que Claudia chanterait « Have a cigar », une voix féminine remplaçant la voix masculine de l’original, et que moi je devrais chanter « I don’t Blame you », une voix masculine remplaçant la voix féminine originale.
Tof : Vous allez jouer à la Nuit Electro Live, au Bataclan le 20 Septembre prochain. Que représente pour vous le fait de jouer devant un public français après tant d’années ? (En fait Claudia n’a jamais jouée en France; ndlr)
Paul Humphreys : En fait j’ai joué l’an dernier à l’Olympia avec OMD [Un Cd & un DVD de la tournée « Architecture & Morality Live 2007 » est sorti au printemps; ndlr] et c’était vraiment fantastique. j’ai toujours aimé jouer à Paris!!!
Tof : Combien de temps durera votre prestation. Nous réservez-vous quelque surprise, covers, voire des chansons d’OMD ou de Propaganda?
Claudia Brücken : C’est un festival qui commencera vers 18h (17h30; ndlr) et nous jouerons pendant 1h10, mais ca va vraiment être du fun pendant 70 mn ! On va bien sur jouer une selection de titres d’ « Instead » , mais également des suprises issues de mon histoire (une commencant par la lettre P.) et de celle de Paul!
Tof : Connaissez-vous les autres artistes qui partageront l’affiche avec vous ? (De/Vision, Waiting For Words, Foretaste & Commuter; ndlr)
Claudia Brücken : On en a entendu parler bien sur mais je ne connais que Waiting For Words et ZeN (son chanteur) que nous avons déjà rencontré.
Tof: Y aura-til un nouvel album pour ONETWO ? OMD? Propaganda ?
Paul Humphreys : Oui. au minimum, l’un des 3 cités. et qui sait.les 3 peut-être !!!
Wahou ! Quelle bonne nouvelle … En attendant de vous applaudir le 20 Septembre au Bataclan, je pense que la meilleure chose à faire est de se relaxer au son si particulier de l’album « Instead ». Les inconditionnels d’OMD, quant à eux, pourront retrouver leur groupe favori grâce à la sortie d’un CD/DVD Best Of, intitulé « Messages », le 23 Septembre prochain, soit à peine 3 jours après la soirée de folie qui les attends au Bataclan. Une tournée OMD de quelques dates est prévue en Grande Bretagne à partir du 27 Septembre, et tiens-toi bien , le groupe doit entrer en studio à la fin de l’année, pour enregistrer un tout nouvel opus ! Encore merci Claudia et Paul, pour cette interview !
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Merci à Nicholas pour l’aide à la traduction
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