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Florence Foster Jenkins (Focus Opéra)

On ne peut faire mieux que Wikipedia pour présenter cette grande dame : « Florence Foster Jenkins (1868-1944) était une soprano américaine, célèbre pour son incapacité totale à chanter correctement» . Soprano, elle l’était : en dépit de couacs fréquents et d’une voix presque toujours détonante, elle atteignait des notes aiguës, voire suraiguës … mais jamais celles écrites par le compositeur.

Née en 1868 en Pennsylvanie, Florence Foster Jenkins suit, enfant, des cours de chant et exprime le désir de partir étudier la musique à l’étranger. Son riche père, sentant la catastrophe arriver, refuse sagement de payer ces études. Florence s’enfuit alors à Philadelphie avec Frank Jenkins, un médecin qui devient son mari. Ils divorcent en 1902. Elle vit dès lors en tant qu’enseignante et pianiste.

À la mort de son père en 1909, Florence hérite d’une fortune qui lui permet de commencer à donner des récitals. Elle trouve un public fidèle et original, composé notamment de vieux messieurs élégants et célibataires, qui viennent s’esclaffer à ses couacs, à ses fausses notes et à ses cris stridents. Tout cela ne la décourage pourtant pas, loin s’en faut. Florence est en effet entièrement persuadée de son talent extraordinaire et considère les éclats de rire comme provenant de rivales rongées de « jalousie professionnelle » . Consciente des critiques, elle rétorquait : « Les gens pourront toujours dire que je ne sais pas chanter, mais personne ne pourra jamais dire que je n’ai pas chanté ».

Sur scène, Florence Foster Jenkins porte souvent des tenues sophistiquées, dessinées par elle-même ; elle apparait drapée de tulle et portant des ailes. Il lui arrive même de jeter des fleurs dans l’audience, secouant un éventail et exhibant encore plus de fleurs dans sa chevelure. Il n’y a plus qu’à l’imaginer quelques décennies plus tard, trônant au sommet d’un char de la Gay Pride.

À 76 ans, Florence Foster Jenkins cède finalement à la demande de son public et se produit au Carnegie Hall, le 25 octobre 1944. Le récital est tant attendu que les billets pour l’événement sont vendus des semaines à l’avance. Florence Foster Jenkins meurt un mois plus tard, d’une crise cardiaque.

L’art de Florence Foster Jenkins se situe au-delà du génie et c’est aussi en cela qu’on peut voir en elle une icône. Jamais sans doute une interprète n’a atteint un tel niveau dans tout ce qu’il ne faut pas faire : absence absolue de justesse, phrasés effrayants, timbre d’une indicible laideur, style indéfinissable, aucun sens de la mesure (bravo pour le pianiste qui rattrape tout ce qu’il est possible). Le vocabulaire habituellement utilisé pour parler des autres chanteur(se)s est ici inutilisable ; il faut créer un nouveau lexique, en empruntant notamment au registre animalier : miaulements, glapissements, jappements, couinements, grincements..

Il est pourtant difficile de considérer Florence Foster Jenkins comme une icône : c’est plutôt une figure burlesque, qui fait certes rire quelques rares amateurs de curiosités mais ne fait rèver personne et, bien évidemment, à qui personne ne peut s’identifier, même au douzième degré. Les quelques parutions récentes (un CD ainsi qu’un DVD et un livre aux Etats-Unis) ne suffiront pas à ressusciter cette mégère hurlante, d’ailleurs aujourd’hui largement dépassée par les pensionnaires de la Star Ac et autres Cindy Sander….

JEF pour CitéGAY





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