En fait, estime Guillaume Bonnet, directeur des campagnes du mouvement international pour l’égalité All Out interrogé à Paris, «il s’agit d’une vague du mouvement anti-gay qui refait surface en Europe, par exemple en Italie» et «reprend les mêmes arguments fallacieux que la Manif pour tous», mouvement qui a tenté d’empêcher l’acceptation du mariage homosexuel en France.
À preuve, ajoute-t-il, «la campagne contre le mariage homosexuel en Slovaquie a emprunté le logo de la Manif pour tous».
Dans une vidéo de l’Alliance pour la famille, mouvement à l’origine de la consultation, diffusée sur internet en Slovaquie, un garçon attend l’arrivée de ses parents adoptifs. Il est déçu quand il voit arriver deux hommes. «Où est Maman ?» demande-t-il.
Une autre vidéo, où l’on voit deux hommes caressant la tête d’un jeune garçon, ne révèle pas sa provenance et l’Alliance a démenti en être l’auteur. «Aimeriez-vous grandir dans une famille comme ça?» demande le garçon.
Alors que le référendum est a priori inutile – la Slovaquie n’autorise ni le mariage entre personnes de même sexe, ni même leur union civile – et sera probablement non valide faute d’atteindre le taux de participation de 50%, la campagne a révélé des réserves de haine à l’égard des homosexuels dans ce pays de l’UE de 5,4 millions d’habitants, dont plus de 80% se disent chrétiens et 70% catholiques.
L’été dernier, 400 000 signatures ont été rapidement recueillies pour demander la consultation.
À quelques jours du vote, un prêtre catholique de rite oriental a taxé en public les homosexuels d’«immoraux» et «pervers», appelant la société à combattre cette «plaie» et à repousser cette «saleté» hors des frontières nationales.
«Le but de ce référendum est de protéger la famille et les enfants», a déclaré à l’AFP le porte-parole de l’Alliance, Anton Chromik, dénonçant des lois votées par le Parlement européen et quelques pays membres de l’UE, qui «sapent la nature unique du mariage».
Les Slovaques sont invités à répondre à trois questions: sur le mariage entre personnes de même sexe, sur l’adoption d’enfants par des couples ou des groupes de même sexe, et sur le droit des parents de refuser que leurs enfants assistent à des cours sur la sexualité ou l’euthanasie.
Inscrit dans la Constitution
Le refus du mariage homosexuel a été inscrit l’année dernière dans la Constitution slovaque par le parti social-démocrate du premier ministre Robert Fico, avec la définition du mariage comme «l’union exclusive entre un homme et une femme».
Les principaux intéressés, discrets et peu revendicatifs, ont cherché à faire entendre leur voix.
«Nous continuerons à chercher la reconnaissance légale des couples de même sexe», dit Martin Macko, chef du groupe LGBT Initiative Inakost, relevant que des pays catholiques et conservateurs, telles l’Irlande et Malte, acceptent l’union civile entre homosexuels.
«Je n’irai pas voter et valider ce référendum avec ma voix», dit à l’AFP Andrea Pallang, propriétaire d’une galerie d’art à Bratislava, qui cohabite avec son amie depuis huit ans.«Je me sens victime de discrimination en matière d’impôts, de politique sociale et de services de santé», ajoute-t-elle.
Amnistie Internationale a mis en garde contre «un recul significatif de la Slovaquie» et une possible violation de la convention des Nations Unies sur la discrimination contre les femmes.
«Si le public répond oui à ces questions et cela est inscrit dans la loi, la Slovaquie renforcera la discrimination homophobe et sapera l’éducation sexuelle», a dit Barbora Cernusakova, chercheuse travaillant pour l’organisation humanitaire.
«La participation ne dépassera pas 35%», dit à l’AFP un analyste de l’hebdomadaire Trend, Marian Lesko. Sur les sept référendums précédents organisés depuis l’indépendance en 1993, un seul a été déclaré valide, celui concernant l’entrée dans l’UE.
Source : Le Journal de Montréal