« Si mon fils est gay, je le brûle avec de l’essence », « Si j’étais président, je tuerais tous les PD » : l’homophobie, en 2014, s’est exprimée – comme la xénophobie – avec une violente décomplexion. « Comment cela pourrait-il en être autrement alors que des hommes politiques, des médias, légitiment ce discours par leurs propres propos ? », soupire Annabel Maestre, l’une des déléguées régionales de SOS Homophobie.
Forte de ses 1 300 adhérents et d’un réseau dense en région (150 en Paca), cette association, basée à Paris, se bat depuis vingt et un ans pour dénoncer, et faire reculer l’homophobie. Pour ce faire, elle produit notamment un rapport – le seul en la matière en France – qui est un état des lieux de l’homophobie dans ce pays.
En 2014, celle-ci a recensé, via sa ligne d’écoute, ses sites internet ou ses partenariats tissés avec d’autres structures, quelque 2 197 témoignages d’agression homophobe. « C’est une tous les deux jours », souligne Annabel Maestre. Certes, ce chiffre a considérablement reculé (- 38 % !) par rapport à 2013, année des débats autour du mariage pour tous qui avait vu une explosion des actes – et donc des signalements – homophobes ?
« Quand on est victime, il faut pouvoir le dire »
« Cependant, si l’on compare les chiffres avec ceux d’une année ‘normale’, comme 2012, où 1 556 cas étaient recensés, on constate qu’à l’inverse, ceux-ci continuent de progresser. » Insultes, harcèlement, agressions physiques se produisent dans près d’un cas sur deux dans le cercle proche de la personne : famille, école, voisinage, travail. Et tous les milieux, tous les âges sont concernés. Des mots dans la rue, des coups dans la cour du collège, un tombereau d’invectives sur les réseaux sociaux : pernicieuse ou frontale, l’homophobie a plusieurs visages. Les bénévoles de l’association constatent avec effarement que sur le Net, tout particulièrement, les « harceleurs » confondent liberté de penser et discrimination, incitation à la haine, voire au meurtre.
Bien qu’il soit impossible à SOS Homophobie, via sa ligne d’écoute, de « localiser » avec précision les appelants, Marseille ne semble pas se distinguer positivement. « C’est une ville où l’on ressent fortement le sexisme, or celui-ci est à la racine de l’homophobie », expose Annabel Maestre. Elle a recensé des témoignages éloquents dans la cité phocéenne, comme celui de cette enseignante de lycée, pétrifiée par la violence verbale de ses élèves ; ou cette autre femme, qui reçoit, de façon anonyme, des courriers de chantage, des menaces. Bien entendu, SOS Homophobie suivra aussi attentivement le procès, en septembre, de Sabrina Hout, l’adjointe des 15e et 16e arrondissements de Marseille qui avait refusé de marier un couple homosexuel.
Sur le terrain, le travail des bénévoles se concentre enfin sur la prévention en milieu scolaire : au cours de 200 interventions en Paca-ouest, ils ont pu sensibiliser plus de 5 000 élèves, de la 4e à la terminale. « Nous ne sommes pas là pour faire changer les gens d’avis, précise Annabel Maestre, mais pour démonter les préjugés. » Leurs interventions permettent aussi de tendre une perche à des élèves en situation parfois dramatique. « Quand on est victime, il faut pouvoir le dire. » C’est aussi le message que les délégués régionaux ont répété, hier soir, au cinéma Les Variétés, lors de la présentation officielle du rapport.
01 48 06 42 41. sos-homophobie.org et, pour les ados, cestcommeca.net.
Source La Provence