Suite à l’avis négatif scandaleux de la Commission nationale consultative des droits de l’homme il fallait s’y attendre. Le projet de loi sur la pénalisation des propos homophobes et sexistes, repoussé depuis des mois est retiré de l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale.
Le projet de loi était vivement critiqué par une partie des parlementaires de la majorité qui se voyaient mal voter pour un texte qui soutenait les droits des personnes LGBT. Les vieux démons qui agitaient les débats sur le Pacs il y a 5 ans ne sont pas tos enterrés, loin s’en faut.
Plus étonnant et scandaleux a été l’avis défavorable rendu par la Commission nationale consultative des droits de l’homme qui sous des prétextes fallacieux de liberté d’expression et autres diatribes a rejoint la position défendue par le lobby catholique. Même la très libérale et raffarin addict association Gaylib a dénoncé l’avis de la CNDH.
En quoi la pénalisation de propos homophobes est contraire à la liberté d’expression et l’instauration d’un régime pénal calqué sur la lutte contre les propos racistes et antisémites ne pouvait être érigé pour punir des propos haineux homophobes et sexistes ? L’argument que le dispositif prévu aurait empêché de se prononcer contre le mariage gay ou l’homoparentalité est inopérant et démagogique. Cette argutie juridique et idéologique ne repose sur aucune vérité factuelle. Est-ce que le dispositif législatif réprimant les propos racistes et antisémites empêche d’avoir un débat d’idée et d’opinion sur l’immigration, l’intégration, la place du religieux et des cultes dans notre pays et sur l’application du principe de laïcité ?
Aussi, le Ministre de la Justice, Dominique Perben, qui devait défendre le texte à l’Assemblée a annoncé hier qu’il était retiré au profit d’amendements du gouvernement au projet de loi instituant la Haute Autorité de Lutte contres les Discriminations et pour l’Egalité. Ces amendements doivent être présentés ce jour au Sénat. Celui même dont le cabinet a freiné des deux pieds sur les questions LGBT est chargé de venir au secours d’un texte qu’il ne souhaitait pas et dont il avait la charge SIC. C’est tout de même navrant que le gouvernement ne puisse assurer dans ses rangs une discipline parlementaire suffisante et ne soit pas monté au créneau pour défendre un projet de loi concocté par les propres services de l’exécutif.
Aujourd’hui, le Garde des Sceaux reçoit l’Inter-LGBT, SOS Homophobie et Jean-Luc Roméro pour présenter les amendements qui devrait reprendre en partie le dispositif prévu au projet de loi.
L’Inter-LGBT a fait le point concernant les modifications apportées :
– l’injure et la diffamation à caractère sexiste seront pénalisées comme les propos homophobes : « c’est une amélioration évidente au texte initial, demandée dès le début des débats par l’Inter-LGBT et les organisations féministes » se réjouit Alain Piriou, Porte Parole de l’inter-associative ;
– le délai de prescription réservé au délit de presse à caractère raciste (1 an) ne s’appliquera pas aux propos homophobes et sexistes : les asssociations devront engager leur action en justice dans un délai de trois mois à compter du forfait, comme pour les propos injurieux ou diffamatoires « ordinaires » . « Bien que regrettant cette disposition » , l’Inter-LGBT « prend acte » de ce que le gouvernement a souhaité donné des gages à la CNCDH ;
– ne seront réprimées que les provocations aux discriminations qui tombent sous le coup des articles 225-2 et 432-7 du code pénal, autrement dit les discriminations interdites par la loi, comme le réclamait le Conseil d’État en juin 2004. « L’Inter-LGBT n’imaginait pas que l’on condamnât des provocations des provocations à des discriminations non interdites par la loi, et a par exemple toujours compris et accepté que des propos opposés à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe et à l’homoparentalité ne soient pas condamnés par les tribunaux. Devant les délires de certains, le gouvernement a estimé que cette position de bon sens ne s’en portait que mieux en étant écrite : l’Inter-LGBT en prend donc acte. L’Inter-LGBT souhaite en effet un débat sur l’ouverture du mariage aux couples de même sexe et l’homoparentalité, qui permette à tous les arguments d’être échangés sans craindre la sanction d’un tribunal. »
Toutefois, pour l’Inter-LGBT, « les amendements ne prévoient pas l’ouverture du droit de réponse pour les association de lutte contre l’homophobie et le sexisme. Ils ne couvrent pas non plus la lutte contre la transphobie. .
Après ces soubresauts, les associations seront plus vigilantes que jamais lors des débats qui entoureront l’adoption ou non de ces amendements. Soit pour la tambouille si un dispositif pénal réprimant les propos homophobes et sexistes est in fine institué, mais attention à la cuisson au risque de provoquer un accident domestique.