Tof : Salut Louis, je suis content de te rencontrer car ton troisième album est tout simplement sensationnel. Ce qui est sympa aussi, c’est qu’il arrive très rapidement après son prédécesseur La nuit m’attend …
Louis : [Sourire] Oui c’était rapide mais si tu veux savoir, il est déjà terminé depuis un an en fait. On aurait pu le sortir encore plus tôt, c’est-à-dire en mars 2007, comme c’était prévu initialement! Il faut dire que dès que j’ai fini un album je pense tout de suite à l’autre. Là, par exemple, je vais faire quelques concerts et je sais que très vite je vais embrayer sur autre chose. Enfin tu sais, si c’était possible, je veux dire s’il n’y avait pas toute la promo et les « à cotés » à mettre en place, ce qui prend du temps, je ferais un album par an.
Tof : La nuit m’attend avait été écrit quasiment en discothèque …
Louis : Oui oui, il était construit autour du thème de la nuit. A l’époque j’avais travaillé avec Alexandre Azaria, qui fait des musiques de films à l’origine, et qui lui, a un son assez orchestré et grandiloquent, assez pop anglaise. Là pour le coup j’avais passé pas mal de mois à essayer de trouver le moyen de marier mon univers et le sien. Ca n’a pas été tout de suite évident: pendant 4, 5 mois j’ai été complètement bloqué. Ensuite, en recommençant à sortir et à écrire en club, ‘il y a des choses intéressantes qui se sont passées, où j’ai trouvé finalement la ligne directrice.
Tof : Qu’en est-il de ce nouvel album Les enfants du siècle ?
Louis : En fait cet album est né surtout de ma rencontre avec Yann Cortella, avec qui j’ai travaillé sur la tournée de l’album précédent, et qui joue de la basse sur scène. Il fait de la musique électronique depuis des années. Ca faisait pas mal de temps que l’idée de marier la chanson en français à de la musique électronique, me travaillait. J’avais pas mal de textes et des mélodies qui étaient assez avancées, et je lui ai demandé trois semaines pour finir l’album. Ensuite la tactique qu’on s’était trouvée, c’était vraiment d’enregistrer une chanson par après-midi. On mettait d’abord une voix témoin, ensuite tout ce qui était rythmique, basse, claviers, et puis vers 17, 18 h, on devait avoir fini la chanson et avoir toutes les bases pour que ce soit prêt à l’arrivée des musiciens. Là on avait un autre jeu qui consistait à ne leur autoriser que trois prises. On s’est rendu compte que les choses les plus intéressantes ressortaient à la première ou la seconde prise, c’est-à-dire quand il n’y avait pas encore le système de réflexion qui se mettait en place. On voulait justement avoir du sang humain, de la matière humaine brute, pour contrecarrer l’aspect un peu «mécanique des machines». Et c’est d’ailleurs généralement ce qu’on a gardé sur les prises avec les musiciens.
Crédit Photo : Laurent Delarozière / Stylisme : Jean-Paul Gaultier
Tof : L’album a donc été enregistré dans un appartement …
Louis : Oui, enfin dans un home-studio ! C’est aussi la différence avec les deux autres albums, car à ce moment là j’étais avec une grosse maison de disques et donc il y avait pas mal de moyens à disposition, même si sur le premier album D’apparence en apparence, on a gardé pas mal de prises des maquettes, parce qu’il y avait une fragilité, quelque chose de sensible, qu’on n’aurait pas pu retrouver à mon avis dans un grand studio. L’avantage de travailler en Home-Studio, c’est l’absence de pression, il n’y a pas l’heure qui tourne. Yann peut travailler très très vite car il connaît bien tout son matériel. Et puis on n’est pas partis dans l’optique de faire un album ambitieux du point de vue financier. On ne voulait pas de prises de batterie avec un son hallucinant, et pour cela un home-studio nous suffisait tout à fait. C’est seulement à la fin qu’on a quand même mixé dans un plus gros studio…
Tof : Apparemment tout s’est passé plutôt dans la décontraction et la gaïté. Pourtant les textes sont assez sombres, même si tu dis que l’album n’est pas larmoyant …
Louis : Non c’est vrai, cet album n’est pas si noir ! Ce que je lui trouve justement d’intéressant, c’est cette espèce d’équilibre entre des textes effectivement un peu sombres, voire un peu lourds par moment, et une musique qui flirte quelquefois presque avec la disco, ou en tout cas une electro assez dansante. Tu vois, je ne voulais pas tomber dans quelque chose qui se complaise dans la tristesse. Je me bats justement contre mes démons, pour ne pas baisser les bras, donc je ne voulais pas verser dans une sorte de facilité à la limite.
Tof : La pochette m’a fait sérieusement penser à celle de l’album Outside de Bowie. Peux-tu m’en parler ?
Louis : [Sourire] Mais oui tu as raison, c’est un portrait à la peinture aussi. Mais en fait c’est une coïncidence totalement innocente. Il s’agit juste d’un portrait de moi désincarné, avec un peu l’idée d’une âme, ou d’une espèce de tension interne, prête à exploser. A l’origine ça devait seulement être un tee-shirt, en tout cas pas une pochette d’album. Je suis tombé dessus à la suite d’une séance avec Yann et je me suis dit que c’était une parfaite traduction visuelle de ce qu’on faisait au niveau du son …
Tof : Quel est le thème de cet album ? Mort, Folie, Chaos ?
Louis : C’est un petit peu tout ça en fait. Fondamentalement c’est surtout un album sur l’angoisse. L’angoisse de ce qui nous attend, l’angoisse de la mort. Tu vois enfin personnellement je ne vois pas comment aujourd’hui on peut éviter d’être angoissé. Si on s’arrête cinq minutes et qu’on regarde autour de soi, on a un petit peu le choix entre les catastrophes écologiques, les catastrophes économiques, toutes ces guerres, cette espèce de tension palpable. Cet album est vraiment le reflet de tout ça…
Crédit Photo : Laurent Delarozière / Stylisme : Jean-Paul Gaultier
Tof : Parlons de ton style d’écriture. Tu utilises beaucoup les points de suspension par exemple, comme si tu collais des fragments de phrase …
Louis : Oui, parce que j’ai essayé de mettre en relation des mots qui ne sont pas forcément de la même sphère. Dans Ailleurs c’est ici, il y a par exemple le passage « Il y a des bulles dans mon sang, ça pleut des revolvers ». On ne sait pas trop où l’on est et où on va. Pendant tout cet album j’ai essayé de suivre ce système d’écriture.
Tof : Est-ce que c’est ça qu’on appelle la technique du « cut up » ?
Louis : [Sourire] Pas vraiment, mais bon ouais à la limite. Tu parles de la technique de Burroughs quand il prenait des phrases, et qu’il mélangeait un peu tout, c’est ça ? Il utilisait des petits bouts de papier, il écrivait des phrases, il découpait tout et il réajustait les morceaux pour voir ce que ça donnait. De ce point de vue, c’est vrai que moi aussi j’ai beaucoup travaillé pour essayer de casser toute logique. On arrive à avoir le même genre de résultat…
Tof : Dans Monologue à la maison blanche, il y a une phrase en particulier, qui ressort comme un leitmotiv : « La réalité se trouve dans l’abstrait »…
Louis : Oui il y a un côté brut et spontané, et en même temps c’est super travaillé. La phrase « la réalité se trouve dans l’abstrait » telle que je l’entends, cela veut dire que « la vérité ou l’essence de toute chose est au-delà de la perception et du monde matériel ». Monologue à la maison blanche est vraiment un travail sur l’inconscient d’un être humain, sur ses phobies, et en même temps il y a une vraie profondeur, comme lorsqu’il dit « Je suis dans un état foetal, comme dans le ventre de ma mère ». C’est en fait un texte qui a été écrit par un ami à moi qui est à l’hôpital depuis une dizaine d’années, et c’est sa voix qu’on entend. Je suis passé à le voir avec un dictaphone et je voulais que ce soit lui qui finisse l’album. Il est allé tellement loin avec cette écriture un peu sur le fil, où on ne sait pas trop où on est ni où on va. Enfin tu vois ce système d’écriture dont je parlais tout à l’heure, lui il l’a naturellement! Ce titre a un côté inconscient, un aspect surréaliste, une espèce d’envie de revenir à l’origine de toute chose, à l’avant-naissance, c’est quelque chose de super fort. Du coup pour moi c’est la chanson la plus réussie. En fait c’est l’aboutissement de tout l’album et de toute cette recherche d’écriture chaotique et de destructuration des phrases. Au niveau du son, ce titre est en faite une totale improvisation basée sur une boucle. On a arrêté quand ça devenait chiant [Rires] Même si le thème de l’album est un peu le déséquilibre, il reste cohérent et organisé, par contre sur le dernier titre on a tout lâché !
Tof : Justement, de quelle manière as-tu voulu la construction de cet album ?
Louis : J’ai voulu qu’il y ait une progression spéciale. Le premier titre Ailleurs c’est Ici est une sorte d’ouverture, qui parle de paradis. C’est vraiment une chanson sur ce mal-être latent mais en même temps bien présent… Ensuite plus on avance dans l’album, plus ça se rétrécit, pour finalement arriver à Monologue à la maison blanche, ou juste avant Les enfants du siècle, qui parle d’apocalypse. Plus on avance, plus l’étau se resserre…
Tof : Dans les Enfants du Siècle, tu répètes sans arrêt que Dieu est mort… Alors dis-moi, le 20ème siècle n’est-il finalement pas si spirituel qu’on l’avait prédit ?
Louis : Si si si, je pense qu’on va y arriver ! Mais il nous faut sûrement encore quelques bonnes catastrophes pour que tout à coup il y ait une conscience mondiale qui se mette en route. Peut-être un gouvernement mondial ou en tout cas une conscience collective qui se mette en place, mais pour l’instant c’est trop tôt parce qu’on n’est pas encore au bord du gouffre. On y va mais il nous manque un bon choc encore [Sourire].
Crédit Photo : Laurent Delarozière / Stylisme : Jean-Paul Gaultier
Tof : Tu fais souvent référence à «La Machine» . Ca symbolise quoi au juste ?
Louis : «La machine», c’est la vie qu’on ne contrôle plus à certains moments, et en même temps dans le contexte de l’album c’est évidemment un clin d’oeil aux sons électroniques. C’est aussi l’idée d’un mouvement dans lequel on est pris, un engrenage d’une certaine manière, quelque chose qui roule quoi qu’il en soit. Il faut faire avec sinon on se fait compresser… Et puis dans Calcutta, je parle aussi de la «machine molle», qui dans ce cas est un clin d’oeil direct à Burroughs. Dans ce cas on parle de l’être humain…
Tof : Parle-moi du clip de « Ailleurs c’est ici »…
Louis : L’idée c’était d’avoir une tension toujours présente, avec le moins d’éléments possible. Le fait que je sois torse-poil comme ça, dans un milieu assez hostile, un endroit rugueux comme une cave, ça donnait un contraste intéressant. Le fait de casser l’image continuellement en post-production ça donnait un sentiment sur la tension. Un corps brisé, une âme brisée, c’est ça qu’on voulait avoir !
Tof : Club Dancing, est un des titres forts de l’album. L’idée de faire intervenir un disco, cela te trottait dans la tête depuis longtemps ?
Louis : C’est d’abord sûrement un petit clin d’oeil à Roxy Music, et puis encore une fois je trouvais que c’était intéressant de mélanger des textes assez romantiques, noirs, lyriques avec une musique club, plus légère, le néon et le côté plus littéraire. En concert elle marche bien c’est vrai. Ce que tu ne sais peut-être pas c’est qu’il s’agit d’une nouvelle version d’un titre très lent qui se trouvait sur le premier album. Et en fait c’est la première chanson qu’on a retravaillée en concert, avec l’optique de faire un mélange electro-chanson.
Tof : Après ton expérience au sein du groupe Ika, et ton premier album solo, tu as dû travailler ta voix pour la rendre plus naturelle… Peux-tu m’expliquer ce concept un peu contradictoire ?
Louis : C’était un groupe de rock avec des guitares qui jouaient à fond, et donc ça m’obligeait à pousser ma voix à l’extrême. Quand le groupe s’est arrêté j’ai travaillé avec un dictaphone pour ne plus pousser ma voix, pour la laisser aller naturellement et pouvoir me concentrer sur l’émotion pure. Le but était de ne plus avoir à me concentrer sur la justesse, sur le fait de pousser ma voix, mais au contraire d’aller vers ce qui était plus naturel pour moi, plus facile.
Tof : J’ai noté aussi une certaine ambigüité dans Ailleurs c’est ici, où tu parles de tes bas de soie …
Louis : [Il rougit] [silence puis éclat de rire] Non mais je trouvais ça rigolo dans l’image! C’est pas une façon d’utiliser un côté androgyne, mais parler de bas de soie dans ces paroles, ça donnait quelque chose d’un peu bizarre. Je travaillais sur un sentiment de déséquilibre donc ça collait bien…
Tof : A voir les commentaires sur ton site myspace on dirait que parmi tes fans, il y en a beaucoup qui aiment Mylène Farmer aussi. Qu’en penses-tu ?
Louis : Huuum je ne crois pas. Peut-être que j’ai le public de Mylène Farmer vu qu’elle fait aussi une musique française mais pas forcément dans la mouvance de la chanson réaliste ou un peu chansonnière. C’est peut-être ça qui plaît. Ou alors peut-être que c’est le fait de mélanger plein de sonorités différentes, et de ne pas rester dans une chanson franco-française réaliste justement !
Tof : Lors d’une interview tu as déclaré que quand tu étais adolescent tu avais du mal à t’accepter. Du coup est-ce que pour toi la musique est une forme de thérapie ?
Louis : Oui bien sûr, c’est une thérapie. Après j’essaie beaucoup de suggérer les choses en utilisant pas mal d’images, pour que chacun puisse s’identifier aux textes et aux musiques. Je n’aime pas faire des choses qui ne regardent que moi, sinon je resterais enfermé dans ma chambre. Même si c’est une forme d’exutoire j’essaie toujours d’ouvrir le débat pour que tout le monde puisse s’identifier. S’accepter c’est découvrir qui on est, remettre en question toute la culture dans laquelle on est, l’éducation parentale. A mon avis c’est ça le travail de toute une vie : se trouver soi et pouvoir dégager toutes les saloperies qui peuvent nous empêcher d’être nous-mêmes…
Tof : Tu te souviens de ce qui t’a donné envie de te lancer dans la musique ?
Louis : Il me semble que ça remonte au collège. Je jouais du piano en sortant des cours. C’était une façon de m’évader. J’ai commencé à jouer dans des groupes quand j’avais 13, 14 ans, mais avant je jouais du piano donc je me faisais des petites chansons en anglais et ça me permettait en sortant des cours de vivre quelque chose d’un peu plus rigolo.
Crédit Photo : Laurent Delarozière / Stylisme : Jean-Paul Gaultier
Tof : L’album précédent était beaucoup marqué par les atmosphères cinématographiques. Sur celui-ci c’est plus discret mais quand c’est le cas, il est plutôt question de cinéma italien avec des références à Mort à Venise, ou encore à La Dolce Vita.
Louis : Oui d’ailleurs dans Mourir à Venise il y a des harmonies un peu à la Nino Rota. Je suis en effet un grand fan de toute la bande des années 60 Fellini, Antonioni, Visconti, Pasolini.
Tof : Il y a la chanson Sirocco aussi, qui rend hommage à l’Italie. Et d’ailleurs le Sirocco est un vent qui rend fou à la base.
Louis : En fait je voulais faire une espèce de chanson d’ambiance, un parallèle entre une passion amoureuse et finalement un meurtre. Car à la fin le narrateur tue la fille, même si c’est plus un assassinat spirituel, puisqu’il veut surtout l’oublier. Il y a une espèce de climat de tension car je voulais avoir une ambiance de film noir des années 50, de pavé mouillé, de brouillard, d’atmosphère un peu lourde, un peu comme dans La dame de Shangaï.
Tof : Avec Mon bel assassin, tu prouves une fois de plus ton goût pour une certaine ambigüité …
Louis : J’ai voulu quelque chose de sensuel pour cette chanson, ce qui la rend finalement intéressante. Elle mélange des éléments de l’ordre du morbide à des choses clairement charnelles, entre le meurtrier et celui qui va se faire assassiner.
Tof : Tes textes sont très travaillés, et tu as un univers vraiment singulier. Du coup est-ce que tu ne te sens pas un peu décalé par rapport à ce qui passe à la radio en ce moment ?
Louis : J’avoue que je n’aime pas toute la chanson française qui se réclame de Brel, Brassens ou Piaf. Il y a toute une bande assez prétentieuse et élitiste, pas très innovante, et que je trouve pas très rigolote. Les gens qui font l’apologie de la vie médiocre et de la petite vie, ça me rend dingue, je ne comprends pas qu’on puisse chanter ça en fait ! Ce que je veux dire, c’est que lorsque Brel chantait des scènes de la vie quotidienne assez violentes, il y avait toujours un moment où il emmenait tout ça aux étoiles. Ca se retrouve aussi en littérature chez Céline, un auteur assez glauque finalement. Toute cette «Nouvelle Scène» se morfond et se complaît dans le plat. Moi ça me dépasse [Rires]
Tof : Toi tu es plutôt fan de rock … ou des artistes écorchés comme Daniel Darc par exemple. Est-ce que tu ne trouves pas que ce qu’on nous propose est finalement un peu trop souvent lisse et aseptisé ?
Louis : Si si, je confirme. Heureusement qu’il y a Daniel Darc, ou Etienne Daho qui essaient de faire une musique en français qui pulse, avec un petit peu de peps. Sinon en electro il y a toute la bande de Vitalic qui est excellente, et puis des groupes comme The Do, Moriarty, Cocoon qui sont super ! Bon c’est vrai qu’ils chantent en anglais mais il faut dire que le français est une langue où tu peux rapidement tomber dans le gnan gnan. Faire des mélodies, faire une musique dansante et essayer de mettre ça avec de la langue française c’est super difficile ! Dans les années 80, tu as Alain Chamfort qui a vachement expérimenté ça, avec Lio. Ils avaient de belles mélodies pas connes. Et puis il y a eu bien sûr Gainsbourg ou Bashung …
Tof : J’ai appris que l’Italie avait supprimé son classement de singles, à cause des problèmes de l’industrie musicale. Qu’est-ce que ça t’inspire ?
Louis : En fait ce qui est le plus important aujourd’hui, c’est de faire des concerts. Je pense qu’à plus long terme le disque sera gratuit, et les musiciens pourront vivre de leur musique seulement en se faisant connaître par le biais des concerts, ou éventuellement avec les droits d’auteur. Il va probablement y avoir des marques privées qui vont parrainer, se maquer avec un chanteur ou un groupe et se servir de son image pour faire parler d’un produit. En échange le chanteur gagnera de l’argent pour pouvoir financer son activité. Le côté pervers c’est qu’à mon avis ça va donner naissance à une nouvelle censure, puisqu’il faudra que l’artiste soit en adéquation avec le produit auquel il sera associé. Et puis, je pense aussi qu’avec l’arrivée du CD dans les années 80-90, les maisons de disques vivaient dans une bulle un peu artificielle. A cette période, on rachetait les disques qu’on déjà en vinyle 33 tours. Il y a eu tout à coup beaucoup beaucoup d’argent. Des mecs qui sortaient d’HEC, ou d’écoles de commerce ont alors commencé à vendre de la musique sans vraiment connaître leur sujet. Ca pose problème car à mon avis quand tu travailles pour une maison de disques, la moindre des choses c’est d’avoir un minimum de culture musicale, de savoir faire de la musique et de savoir ce qu’on vend. La musique c’est autre chose que des yaourts. Mais bon, grâce à internet, j’ai l’impression que la musique va petit à petit être moins formatée. Regarde l’album de The Do qui cartonne ! Chanté en anglais en plus, ce qui généralement en France de fonctionne pas. Les gens ne sont pas débiles, ils se font leur propre culture musicale par internet. Tu ne peux pas leur faire bouffer n’importe quoi à coup de marketing, donc je dis « Ouf ! »
Crédit Photo : Laurent Delarozière / Stylisme : Jean-Paul Gaultier
Tof : Pour qui écrirais-tu si on te le demandait ?
Louis : Et bien tu vois, pour l’anecdote, En sautant du 8ème étage était initialement destinée à un candidat de la Nouvelle Star, mais ils n’en n’ont pas voulu . A vrai dire, je ne connaissais pas du tout l’émission et d’ailleurs celui à qui elle était proposée n’a pas gagné. Le concept de ce genre de programme me pose un problème, car je pense que pour être un vrai chanteur et écrire des textes, c’est une affaire d’au moins dix ans, à condition d’écrire tous les jours. La façon de montrer la musique dans ces émissions là, c’est donner une mauvaise image de ce qui est vraiment un métier mine de rien. Dommage parce que du coup tous le travail des musiciens, des chanteurs, des mecs qui font la lumière, est complètement vulgarisé, et je trouve ça dangereux. Je souhaite juste à ceux qui participent de savoir couper le cordon comme Olivia Ruiz a réussi à le faire…
Tof : Parle-moi de la Valse de l’Amant Possessif, qui n’est d’ailleurs pas une valse …
Louis : [Sourire] A l’origine ça devait en être une, mais on l’a complètement détournée. Au début c’était vraiment une chanson en trois temps, qu’on a complètement zigouillée pour pouvoir la rentrer dans l’album et la mettre à notre sauce électro. Comme tout ce que j’écris, le texte est un peu autobiographique, mais ici c’est très poussé à l’extrême. Mais oui, la jalousie maladive, c’est quelque chose que j’ai connu. C’est clair que c’est un sentiment aliénant, une saloperie qui bousille.
Tof : Tu as pas mal de succès auprès des gays, et d’ailleurs tu comptes Jean-Paul Gaultier parmi tes grands fans …
Louis : Oui c’est vrai, il a même créé les vêtements dans lesquels j’apparais et je me produis! Je ne sais pas d’où ça vient en fait… Peut-être de mon écriture. J’adore Jean Cocteau, Genet, Rimbaud, donc il y a sûrement une sensibilité commune…
Tof : Sur l’album précédent tu chantais Opium avec Virginie Ledoyen et maintenant tu chantes Alcool …
Louis : Qu’est-ce que tu veux savoir ? Si sur le prochain il va y avoir Crack ? [Rire] Non je rigole. Mais c’est vrai que j’adore l’ivresse, me mettre dans des états pas possible. Me mettre la tête à l’envers, ça m’aide à écrire… Ca me passera peut-être mais pour l’instant c’est un équilibre qui me convient bien.
Tof : Quels sont tes projets ?
Louis : J’espère qu’on va pouvoir faire des concerts car j’ai très envie de faire exister cet album. En tout cas des dates s’ajoutent petit à petit, avec le Trabendo le 2 Avril ! Ca m’embêterait que l’album passe à la trappe parce qu’il exprime vraiment quelque chose de fort. Et puis on va faire d’autres morceaux, d’autres reprises (Louis reprend quelquefois Madonna et Joy Division; ndlr). On va encore déstructurer des morceaux qu’on a déjà joués et faire des plages plus longues, et puis ajouter des chansons des anciens albums dans des versions réactualisées, pour les assortir au son des Enfants du Siècle . Bref, on va pousser les chansons encore plus loin !
Merci beaucoup Louis pour ce bon moment gorgé de sincérité! On a vraiment hâte de venir t’applaudir à nouveau, pour découvrir les nouvelles orchestrations dont tu parles. Y aura-t-il une nouvelle version d’Opium par exemple ? Virginie Ledoyen fera-t-elle une apparition ? Nous feras-tu le plaisir de reprendre à nouveau de façon magistrale, l’hypnotique Decades, de Joy Division, ou Music de Madonna. Y aura-t-il d’autres surprises encore ? Suspense… On sera là !
Tournée en préparation :
18-01-08 Le Nautilys (Comines – 59)
21-01-08 Le Réservoir (Paris – 75) – Concert privé
23-01-08 « Le Pont des Artistes » live sur France Inter (diff. le 26-01-08)
02-02-08 « Musicalement vôtre » en direct sur Aligre FM
04-02-08 « Sous les ***… » en direct sur France Inter
07-02-08 Chronique musicales de Marion Bernard sur France Info
11-02-08 « Réservoir Bleu » live sur France Bleu IDF (diff. le 07-03-08)
Du 11 au 17-02-08 « Monter le son » en multidiffusion sur Autoroute FM< 15-02-08 « Le Fou du Roi » en direct sur France Inter
17-02-08 « Électron libre » sur France Inter
18-02-08 « TNT Show » live en direct sur Direct 8
29-02-08 Le Théâtre de Poche (Bethune – 62)
01-03-08 Le Sillon (Rouen – 76)
21-03-08 L’Usine (Istres – 13)
02-04-08 Le Trabendo (Paris – 75)
04-04-08 L’Abattoir (Lillers – 62)
18-04-08 Le Cousty (Besançon – 25) – option
19-04-08 La Grotte (Strasbourg – 67) – option
29-04-08 Printival Boby Lapointe (Pézenas – 34) – option
Crédit Photo : Laurent Delarozière / Stylisme : Jean-Paul Gaultier
Pour plus d’infos n’hésite pas à visiter le myspace de Louis
Découvre le clip de Louis « Ailleurs c’est Ici » :
Le Making-Of de l’album :
Lire les interviews précédentes de CitéGAY : Calvin Harris – Micky Green – Roisin Murphy – Enrique Iglesias – Calogero – Maroon 5 – Christophe Willem – Zazie – Jay Jay Johanson – A-Ha – Cerrone – David Guetta – Elodie Frégé – Duran Duran – Elli Medeiros – The Killers – Kim Wilde etc, etc …