Communiqu
de presse vendredi 28 novembre 2008
Journe
mondiale de lutte contre le sida Sida : prvenir, ne pas punir – lundi 1er
dcembre // 18h30 // Bastille Pourquoi Act Up-Paris manifestera
contre la pnalisation de la transmission du VIH
4)
La situation des prisons est incompatible
avec l’accs aux soins dont une personne sropositive a
besoin
La
pnalisation de la transmission du VIH a pour consquence inluctable
l’emprisonnement de personnes gravement malades. En effet,
l’administration de substance nuisible ayant entran une infirmit
permanente peut tre punie en France jusqu’ vingt ans de rclusion
criminelle[1]. Or, la prison demeure un lieu de non-respect de la
protection de la sant et de la dignit des dtenus, et notamment des
malades. Ds lors, Act
Up-Paris estime que les conditions de vie et d’accs aux soins en prison,
ainsi que la difficile application de la loi sur la suspension de peine
pour raisons de sant, rendent la dtention incompatible avec la prise en
charge d’une personne atteinte d’une pathologie lourde.
Des
conditions de vie incompatibles avec la maladie De
nombreux rapports dnoncent la surpopulation et le manque chronique de
moyens du systme pnitentiaire franais. En 2003, un rapport du Comit
europen de prvention de la torture, avait fait tat de « traitements
inhumains et dgradants » dans les prisons franaises, consquences de leur
surpopulation. En juillet 2007, le nombre de places tait de 50 557 pour
61 810 dtenus, soit une densit de 122% et de 126% en juin 2008, un
record absolu[2]. Dix tablissements ou quartiers ont une densit
suprieure 200%, 42 ont une densit comprise entre 150 et 200%, 51 entre
120 et 150%, 36 entre 100 et 120 % et 87 ont une densit infrieure 100
%[3]. Dans son tude de 2006, la Commission Nationale Consultative des
Droits de l’Homme s’indignait : les locaux des douches sont souvent
insalubres, sans aration et couverts de moisissure . L’hygine
dfectueuse en prison dpasse le cadre de la surpopulation carcrale, la
promiscuit et l’tat dplorable des locaux. Elle concerne aussi l’hygine
alimentaire car la nourriture en prison est source d’ingalits entre les
dtenus, dont la plupart sont sans ressources (certains aliments et
complments alimentaires ne sont accessibles aux dtenus que s’ils les
achtent).
Un
accs aux soins insuffisant Il
est impossible pour les dtenus malades de bnficier d’un vritable accs
aux soins en prison : compte tenu de la surpopulation carcrale, le
personnel mdical des Units de Consultations et de Soins Ambulatoires
(UCSA) n’a pas les moyens de faire face un surcrot de travail. Les
dtenus malades ayant besoin d’examens mdicaux approfondis ou de
traitements adquats dans le cadre d’hospitalisation de moins de 48 heures
doivent alors se rendre l’hpital de proximit. Mais de trop nombreuses
extractions mdicales sont annules ou refuses en raison du manque de
personnel policier ou pnitentiaire. De plus, les dtenus malades sont
contraints d’tre menotts, ce qui constitue une source supplmentaire de
stress et d’humiliation. En France, le taux de prvalence en milieu
carcral est sept fois suprieur la normale et les moyens mdicaux sont
insuffisants, notamment pour traiter les cas de sida au stade clinique 2
ou plus qui sont eux en augmentation[4]. La plupart des traitements
antirtroviraux sont disponibles en prison. Cependant, lors de l’entre en
dtention ou lors des transferts, il arrive qu’il y ait des carences de
quelques jours dans la prescription et l’accs aux antirtroviraux. De
plus, le VIH est souvent associ d’autres pathologies : cancers,
atteintes cardiovasculaires ou hpatites virales, qui compliquent encore
la prise en charge. En outre, l’accs aux soins pour les personnes
sropositives dtenues ne se rsume pas la mise sous antirtroviraux et
des consultations d’infectiologie. Il ncessite galement l’accs
l’ensemble des mdecins spcialistes pouvant intervenir dans l’apparition
de maladies opportunistes et autres complications lies aux traitements.
Or l’accs des consultations spcialises est alatoire d’une prison
une autre, soit par manque de plateau technique l’UCSA, soit parce que
les extractions mdicales l’hpital de rattachement sont complexes
mettre en place et contingentes. Par exemple, seuls 56 % des UCSA ont la
liste des dtenus librables, 52 % leur donnent des mdicaments, 40 % une
ordonnance, un tiers font une lettre au mdecin traitant et, au plus, un
quart transmettent les coordonnes d’un mdecin aux dtenus librs. Quant
au relais avec une association, il n’est automatiquement assur que dans 5
% des cas[5]. Le recours des soins d’urgence, ou un
accompagnement mdical, ncessaire en cas d’angoisse profonde, est quant
lui parfois rendu inaccessible. L’IGAS et l’IGSJ, dans leur rapport de
2001, notaient ainsi que l’absence de mdecin de garde, les conditions
d’alerte des surveillants, les dlais d’accs aux cellules [taient]
autant d’lments qui peuvent aboutir une gestion de l’urgence
insatisfaisante . En outre, l’Acadmie de Mdecine, dans son rapport de
dcembre 2003, soulignait que le suivi d’un traitement prescrit pour
tre rparti sur 24h a les plus grandes chances d’tre interrompu
.
La
suspension de peine remise en cause La
loi de 2002 sur la suspension de peine pour raisons de sant tait
porteuse d’espoirs pour les malades dtenus et leurs familles. Grce
elle, les personnes dont le pronostic vital est engag pouvaient
mourir hors des prisons et dans leur famille . Aux dtenus malades dont
l’ tat de sant est durablement incompatible avec la dtention , cette
loi permettait de bnficier des traitements adquats ; elle favorisait
une meilleure observance par rapport aux soins prodigus en
dtention. Mais, trop peu applique, mconnue des dtenus, cette loi
est aujourd’hui drastiquement remise en cause par un des amendements
adopts en 2005, qui conditionne la suspension de peine l’absence d’ un
risque grave de renouvellement de l’infraction . Cette notion,
extrmement floue, cautionne par avance l’arbitraire des dcisions des
juges d’application des peines, qui variera au gr de faits divers
surmdiatiss. Le nombre de personnes concernes commence seulement
tre connu par l’administration pnitentiaire et le ministre de la sant.
Combien de dtenus sont atteints de pathologies graves et donc en droit de
pouvoir bnficier d’une suspension de peine ? Personne ne peut le dire
avec exactitude aujourd’hui. L’urgence demeure pourtant pour chacun
d’eux.
Les
prisons sont surpeuples et insalubres. On y recense un suicide tous les
trois jours. Les conditions d’accs aux soins et aux traitements y sont
notoirement incompatibles avec la prise en charge que ncessite un malade
du sida. Une raison de plus pour ne pas pnaliser la transmission sexuelle
du VIH, qui a pour consquence concrte d’envoyer des malades en prison,
o elles et ils ne peuvent se soigner correctement.
Demain
: De
l’impossibilit scientifique de prouver qui a contamin qui. Tests
gnotypiques et procs autour de la contamination VIH par voie sexuelle
:
suite de l’argumentaire contre la pnalisation de la transmission du
VIH
[1]
Voir art. 222-7 222-14-1 du Code Pnal [2] 63.838 dtenus en France :
un record historique, Libration, 13 juin 2008 ; Nombre des
dtenus record dans les prisons franaises, Libration, 22 juillet
2008 [3] Statistiques mensuelles de la population dtenue et croue,
1er avril 2007, Direction de l’administration pnitentiaire [4]
Sexualit carcrale et sida , association Ban Public [5]
Accompagnement mdico-social post-carcral des dtenus atteints
d’hpatites B, C et d’infection VIH , enqute mene auprs des UCSA en
2006 par l’quipe du Dr Andr-Jean Rmy (UCSA Perpignan, ple
CSUD).
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