Marie-Claude Pietragalla, célèbre danseuse étoile devenue chorégraphe, bouscule notre quotidien avec un spectacle époustouflant créé autour de son compagnon Julien Derouault, métamorphosé pour l’occasion en une sorte d’Albator des temps modernes.
Sous les yeux émerveillés et curieux des spectateurs, Marie Claude propose une fresque gigantesque retraçant le périple à la fois fantasmé, et terriblement manga d’un Marco Polo sculptural, avide de découvertes.
Dès le premier tableau, sorte d’éveil programmé de cet homme guidé par une destinée hors du commun, l’assistance découvre un univers mêlant le chant lyrique live, le film d’animation, projeté sur écran géant et bien entendu la danse contemporaine.
Au milieu de ses 20 danseurs émérites, issus du monde du hip-hop, Marie -Claude Pietragalla apparaît en dame blanche évanescente, créature filigrane et diaphane, en Eve à la recherche de son Adam, en Pénélope qui vient épauler son Ulysse.
Vierge ou Chimère, sorte d’idéal féminin ensorcelant, peut-être un peu trop présent, elle survole littéralement la scène tout en arabesques et volutes sensuelles.
Quasi unique élément féminin, hormis une danseuse et les deux chanteuses lyriques, elle devient aussi le « fil conducteur » irréel entre chacun des 5 magnifiques tableaux, représentant les 5 éléments asiatiques(le feu, l’air, l’eau, la terre, et le métal).
Il faut savoir que le projet d’une « comédie musicale » autour de Marco Polo lui a été soufflé par Pierre Cardin, producteur du spectacle, passionné de Chine et de Hip-Hop.
Bénéficiant d’une mise en scène inspirée du Livre des merveilles , il se présente comme une sorte de manga multimédia, tri-dimensionnel et atemporel, qui réussit le pari de connecter le spectateur à une nouvelle réalité, parfois hallucinogène.
L’imagerie évoque bien sûr le cinéma chinois, spécialement les « Histoires de fantômes chinois » de Ching Siu-Tung, mais aussi beaucoup Enki Bilal, et même les fameuses estampes japonaises.
Les animations toujours très fluides et très réalistes, probablement calquées sur des séquences filmées, ajoutent encore à la poésie de la mise en scène, et sont régulièrement prolongées sur scènes grâce à du brouillard artificiel, ou des effets visuels qui donnent parfois l’impression d’assister à un film, ou plus exactement à un clip-vidéo en 3D.
Marco Polo c’est aussi un peu l’histoire d’une évolution à travers les âges, du plus sauvage au plus futuriste, avec pour point commun un rythme quasiment toujours tribal dans les chorégraphies.
Suivant ses aspirations on préfèrera soit la première partie classique, avec notamment un passage dominé par des mantras asiatiques hypnotiques, soit la deuxième, beaucoup plus moderne, avec l’intervention tranchante et inattendue du fameux « Breathe » de Prodigy, enchainé à un titre très énervé des « Chemical Brothers », et pendant lequel on se retient de ne pas se lever dans la salle.
Un conte moderne et unique qui mélange les genres et fait voyager l’âme à travers l’espace et le temps (d’un Venise englouti par les eaux à un monde futuriste déshumanisé, en passant par la Chine impériale), une « comédie musicale » dans laquelle ce sont les corps qui s’expriment plus que les voix, une formidable performance marquée par la rigueur de 20 danseurs dont le pas est réglé au millimètre près, le chant angélique des trois conteurs, dont les voix s’unissent parfois pour des polyphonies à couper le souffle, sans oublier la performance exceptionnelle, peut-être la plus physique, de Julien Derouault, présent sans jamais discontinuer, dans tous les tableaux et synchronisant sa gestuelle au gré de celle des autres danseurs, et d’une Marie Claude Pietragalla éblouissante, malgré une attitude souvent froide, ce sont autant d’éléments qui font de ce spectacle probablement un des plus innovants et marquants de ce début d’année 2009 .
C’est devant un public médusé qui se lève pour une stranding ovation, que la troupe dit au revoir …
Un spectacle incroyable à ne pas manquer …
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Marie-Claude PIETRAGALLA présente MARCO POLO – du 6 au 15 Mars 2009 au Palais des Congrès de Paris
