Le gouvernement Fillon, dans sa quatrième version depuis l’accession de Nicolas Sarkozy à la Présidence de la République a été annoncé hier, lors de la messe du 20 heures, par le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant. Avec un nombre stable de 38 portefeuilles, beaucoup des membres du gouvernement précédent resteront sur la photo officielle lors de la sortie du conseil des Ministres du jour. Toutefois, une composition plus politique semble se dégager, à analyser sous l’angle LGBT.
Les sortants. Départs prévus et confirmés pour Michel Barnier et Rachida Dati, élus au parlement européen. Le premier rêve de faire parti de la prochaine commission européenne, la seconde paie le désamour élyséen la concernant et la guerre larvée qui l’opposait au monde judiciaire, même si elle n’a fait qu’appliquer la feuille de route qui lui avait été dictée. Autre sortante, de taille, Christine Boutin, la pourfendeuse officielle du Pacs qui avait ressorti la hache de guerre concernant le statut du beau-parent, ou défendait les propos du pape sur le préservatif, avant de se faire rappeler à l’ordre. Son leadership revendiqué sur la frange catho de la droite et l’annonce opportune du renommage de son Forum des Républicains Sociaux en Parti Chrétien-Démocrate n’auront pas suffi pour qu’elle conserve un maroquin ministériel, l’Elysée considérant qu’elle a échoué à son poste au Logement. Réagissant sur RTL à son éviction, l’ancienne ministre du logement du gouvernement Fillon a mystérieusement déclaré : « Quand on me pique, je sais répondre ». Retrouvant, au bénéfice de la réforme constituionnelle son siège de parlementaire, elle devrait retrouver tout autant sa liberté de parole, cela promet. Bernard Laporte, qui avait abandonné ses juteux contrats publicitaires pour entrer au gouvernement, aura vite été marginalisé après des déclarations hasardeuses et la faiblesse apparente de sa maîtrise des rouages ministériels et politiques. Christine Albanel paie quant à elle sa gestion de la loi Hadopi. Roger Karoutchi subit les velléités indépendantistes des parlementaires et du premier d’entre eux à l’UMP, Jean-François Copé. La révélation de son homosexualité lors de la campagne d’investiture pour les régionales franciliennes n’aura pas suffit à le faire gagner, échec le marginalisant davantage. Enfin, Yves Jégo paie sa gestion de la crise des DOM, André Santini ses démêlés judiciaires.
Les entrants. On attendait l’arrivée du chasseur de Mamouths, on a eu le réalisateur de Madame Butterfly. A l’affiche donc ce mercredi, Frédéric Mitterrand, homme des arts sans nul doute qui devra montrer qu’il na pas été casté pour son seul patronyme mais qu’il pourra manier l’art politique dans sa gestion de la rue de Valois. Frédéric Mitterrand ne cache pas son orientation sexuelle et avait fait un récit objectif et sincère de sa vie privée, dans une autobiographie, ne taisant rien de sa pratique des relations tarifées. Celui qui a fait adopter les cérémonies de Pacs en Mairie dans sa municipalité de Nice, Christian Estrosi, avait promis à ses administrés de se consacrer à ses seuls mandats locaux et parlementaires. Il se voyait à la sécurité, il hérite de l’Industrie. Pierre Lelouche qui nie toujours des propos homophobes qui lui sont attribués a montré à plusieurs reprises son soutien au mouvement LGBT associé à l’UMP, GayLib. Cet atlantiste, partisan de la Turquie au sein de l’Union, qui rêvait de la Défense, se penchera sur les questions européennes alors qu’on le voit davantage tourné vers Washington que Bruxelles. GayLib ne manquera pas de le sensibiliser sur l’importance de voir l’adoption d’une directive horizontale sur la lutte contre les discriminations. Autres entrants, Henri de Raincourt (Relation avec le Parlement), Nora Berra (Aînés), Benoist Apparu (Logement) et Marie-Luce Penchard (Outre-mer), Michel Mercier (Aménagement du territoire).
Les déplacés. Brice Hortefeux qui ne convainquait pas aux Affaires sociales voit son portefeuille pris par Xavier Darcos, lassé de l’Education et aux rondeurs langagières propres à assurer le dialogue social. Hortefeux prend la Place Beauvau. C’est Luc Chatel, promu rue de Grenelle, qui devra persister dans les travaux liés à la lutte contre l’Homophobie à l’Ecole quand Xavier Darcos devra se saisir des revendications sociales LGBT sur les pensions de réversion et autres droits sociaux. Autres déplacés : MAM (Justice), Bruno Le Maire, promu à l’Agriculture, Valérie Létard (Ecologie).
La Marginalisée. S’en défendant ce matin, Rama Yade se retrouve pourtant marginalisée en récupérant les Sports. Son poste aux Droits de l’Homme disparaît, comme le réclamait Bernard Kouchner, amnésique du socialisme. L’ancien porteur de sacs de riz oublie tout autant ses déclarations enflammées anciennes sur le droit d’ingérence ou les droits de l’Homme et se montre taiseux sur ces questions. Rama Yade semble payer sa popularité et ses déclarations qui pouvaient contredire le réalisme politique, cynisme diront d’autres, affiché au Quai d’Orsay et à l’Elysée. Elle avait défendu sans faillir la lutte contre l’Homophobie au niveau International là où Bernard Kouchner n’a jamais eu un mot sur le sujet. Les associations auront à coeur que le sujet ne soit pas enterré.
Les restants. A la Famille, Nadine Morano reste en poste malgré ses ambitions affichées et malgré les reproches d’une frange conservatrice qui lui reprochait ses positions progressistes sur les mères porteuses ou l’homoparentalité. A la Santé, Roselyne Bachelot conserve son portefeuille. Comme dans certains vieux couples, si le divorce n’est pas officialisé avec la communauté LGBT et que l’union reste de façade, elle devrait continuer à appliquer le travail de démantèlement larvé de la sécurité sociale, devra gérer l’annonce faite par Nicolas Sarkozy de confier au secteur privé mutualiste la gestion des Affections de Longue Durée (ALD) en contradiction totale avec le principe même de solidarité nationale et gérera sans ambition ni plus de moyen la lutte publique contre le VIH.
Le premier conseil des Ministres du gouvernement Fillon 4 aura lieu ce jour à 11 heures.
EN SAVOIR PLUS
L’annonce de la composition du gouvernement sur le site de l’Elysée : www.elysee.fr