Le « Festival della Valle d’Itria » représente dans la cour du Palais ducal de Martina Franca des opéras rarement donnés ou franchement oubliés.
En 2008, il a proposé une petite merveille, le Don Bucefalo de Antonio Cagnoni. Pour notre plus grand bonheur, un enregistrement a été effectué par l’éditeur italien Dynamic, qui vient de le publier.
Laissons parler Yonel Buldrini, auteur d’une étude passionante sur cet opéra (sur le site de Forumopéra) :
« Nous sommes en 1847, quatre années après le chef-d’oeuvre de Donizetti Don Pasquale, dont on a dit qu’il était le dernier opéra bouffe. En fait, il y en aura bien d’autres, comme ce charmant Crispino e la Comare des frères Ricci, ou le savoureux Don Checco de Nicola De Giosa, datant tous deux de 1850, mais on avait l’impression que l’opéra bouffe italien, pétillant au possible en sortant des mains de Rossini, puis devenu tendre, sentimental et suave entre celles de Donizetti, n’avait plus rien à démontrer. De fait, les compositeurs produiront de moins en moins de comédies sentimentales, même si le filon ne s’épuisera jamais, car à une date aussi tardive que 1915, naîtra par exemple la délicieuse Madame Sans-Gêne de Umberto Giordano ».
Ecrit par un jeune homme de 19 ans, Don Bucefalo connaît un énorme succès, en Italie, puis à Paris. Je me surprends ce soir à réver d’un Don Bucefalo monté à l’Opéra Comique….
Après Il maestro di capella de Domenico Cimarosa et avant Arianne à Naxos de Richard Strauss, Don Bucefalo est un opéra… qui parle de l’opéra ! C’est donc un sujet en abîme, mais comme c’est un opéra bouffe, on n’y trouve nulle trace de la querelle qui opposa les tenants de Gluck à ceux de Piccini. Jugez-en plutôt :
Un compositeur un peu sur le retour prend son café installé à une terrasse. Il est soudain frappé par la beauté du chant des paysannes et en vient à leur proposer de leur donner des leçons afin de leur faire entamer une carrière… internationale !
Vieux cochon, on connaît la musique !!!
Bien évidemment, l’opéra est loin d’être un chef d’oeuvre et la répétition tourne à la catastrophe, ce qui génère une série de délicieux effets comiques.
Yonel Buldrini fait justement remarquer que la parodie est également littéraire puisque l’un des chanteurs, comprenant mal les mots du souffleur, transforme « le minacce e i lamenti » (les menaces et les lamentations), en : « li spinaci e le lenti « , les épinards et les lentilles !
L’enregistrement que nous propose Dynamic est une vraie réussite : distribution d’excellente tenue, chef qui dirige avec efficacité et sensibilité, tout est simple, clair et bien en place. Un vrai régal qui laisse espérer que cette résurrection sera suivie de bien d’autres. Beaucoup de pépites oubliées dorment encore dans les bibliothèques musicales.
JEF pour CitéGAY ( http://jefopera.blogspot.com/ )