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Opéra : Billy Budd

Jusqu’à hier soir, je ne connaissais de Britten que son concerto pour violon, partition bouleversante et envoutante qui ne vous lâche pas. Mais honte à moi, j’étais bien ignorant de l’oeuvre lyrique de celui qui est souvent présenté comme l’auteur d’opéras le plus important du XXème siècle, en tout cas le plus grand compositeur anglais depuis Purcell.

Donc, première de Billy Budd, hier soir à Bastille. L’assistance est élégante, distinguée, mélomane, et surtout très masculine. Jean-Laurent et moi ne déparrons pas, loin s’en faut, au milieu d’un parterre très « gaymour », auréolé de la présence remarquée de Pierre Bergé.

Il faut dire que le sujet est sans équivoque. Directement tiré d’une nouvelle de Herman Melville, le livret de Foster et Crozier situe l’action sur un bâtiment de guerre anglais, en 1797. Angleterre, qui comme une bonne partie de l’Europe, est en guerre contre la France révolutionnaire. Billy Budd, jeune et beau matelot, enrôlé de force comme beaucoup à l’époque, excite le désir du capitaine d’armes, Claggart, personnage refoulé et sadique qui, faute de posséder Billy, l’accuse à tort de trahison. Paralysé par son bégaiement, Billy frappe Claggart et le tue devant Vere, le capitaine, qui ne réussit pas à le sauver de la pendaison mais restera hanté de cette injustice jusqu’à la fin de ses jours et qui, dans l’opéra, raconte l’histoire comme le souvenir d’événements anciens.

L’oeuvre n’est pas vraiment facile et nous a même semblé parfois un peu longue, je ne crains pas de l’avouer. A l’instar d’une bonne partie du répertoire lyrique du siècle dernier, Billy Budd peut paraître en effet aride, notamment dans l’écriture vocale. C’est donc à la scène que l’oeuvre doit être découverte et appréciée, ce qui, somme toute, est assez normal pour un opéra. Et sur ce plan, le spectacle d’hier soir était une réussite totale.

Le baryton Lucas Meachem dans le rôle-titre et Kim Begley, dans celui du capitaine Vere, sont apparus extraordinaires de puissance et d’émotion. Le sadique Claggart est lui même très bien servi par Kurt Rydl, dont le timbre de voix, qui dans d’autres rôles pourrait sembler ingrat, est ici totalement adapté au personnage.

Le chef britannique Jeffrey Tate, sans doute le meilleur spécialiste actuel de ce répertoire, marque par sa direction précise et ciselée autant que par ses formidables élans dynamiques et dramatiques, particulièrement évidents dans les somptueux intermèdes orchestraux.

Enfin, un très grand coup de chapeau à Francesca Zambello, dont la mise en scène offre une démonstration spectaculaire, d’un bout à l’autre convainquante, des ressources techniques prodigieuses de Bastille.

JEF pour CitéGAY ( http://jefopera.blogspot.com/ )





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