« C’est un
monstre qu’il nous faut regarder ! »
Sciences
sociales, homosexualit et sida Jeudi
24 et vendredi 25 juin 2010
Les 24 et 25
juin prochains, la mission Sciences sociales de Sidaction organise deux journes
de travail sur les thmatiques croises du sida et de l’homosexualit. Ces
journes ont pour objet la prsentation de travaux de doctorat et de post
doctorat mens par des chercheurs soutenus par Sidaction, le dialogue avec des
chercheurs anglo-saxons et l’change avec un public large, issu des communauts
gays et de la lutte contre le sida. Ces travaux, ressortissant largement de
disciplines employant des mthodes de recherche qualitative, fournissent
l’occasion de questionner les catgories souvent employes dans le champ de
la prvention du VIH, que ce soit par le milieu acadmique, associatif ou celui
de la sant publique : communaut, vulnrabilits, rapport au risque, vie de
couple, usage de drogues, sexualit multipartenaire, responsabilit,
intentionnalit. L’articulation entre production et usage de ces catgories fera
l’objet de dveloppements critiques et de dbats.
Reid
Hall, Universit de Columbia – 4 rue de Chevreuse, 75006 Paris – Mtro Vavin
Jeudi
24 juin 2010
9h
Accueil
9h30
Ouverture
9h45
Des vulnrabilits
renforces ?
Vincent Rubio,
Universit Paris Nanterre – La Dfense
Les jeunes
gays proposant des prestations sexuelles rmunres Paris et en rgion
parisienne
Sandrine Fournier, Sidaction
Usage de psychoactifs en contextes gais
Kane Race, University of Sydney, Australie
Configurations of Responsibility: Barebacking, Serosorting, and the
Negotiation of Safety
Modration :
Vincent Douris, Sidaction
13h
Djeuner au Reid Hall
14h30
Les extrmes :
couples et compulsivit sexuelle
Laurent
Gaissad, Universit Paris Nanterre – La Dfense
« Ils vont bien » : L’pidmiologie en sant mentale l’preuve
des rseaux festifs gays
Jrme Courduris, CNRS,
centre Norbert Elias,
Marseille
Le couple comme dernier refuge ? Homosexualit masculine, conjugalit
et VIH
Barry Adam, University of Windsor, Canada
Intersections entre no-libralisme, masculinit, sexe et
risque
Modration :
Sandrine Fournier, Sidaction
Vendredi
25 juin 2010
9h30
Des sujets
engags : intentionnalit, responsabilit
Pierre Bonny, Universit de Rennes II
Lecture critique des recherches en psychologie sur les prises de
risques chez les gays
Gabriel Girard, cole des
Hautes tudes en Sciences
Sociales, Paris
Du relapse au bareback, l’intentionnalit du risque au cour de la
prvention
David Halperin, University of Ann Arbor, tats-Unis
Est-ce que
la prvention rend malade ?
Modration : Veronica Noseda,
Sidaction
12h30
Conclusion
Jean-Yves Le
Talec, Universit de Toulouse II-Le Mirail
Presque
invariablement, les discours reliant homosexualit et sida supposent un sujet,
individuel ou collectif, confront au risque : un sujet fragile,
susceptible d’tre bless ; un sujet malade. Dans une histoire longue o
le caractre pathologique d’une sexualit non reproductive n’a pas manqu
d’tre rgulirement mobilis, comment ne pas faire ce constat, l’instar de
Michael Scarce : « Il est devenu presque impossible d’imaginer ce quoi pourrait
ressembler un homosexuel en bonne sant » 1. Non que l’on pense
l’ensemble des homosexuels infect, mais plus probablement que l’on ne puisse en
imaginer un seul qui ne soit pas pris en dfaut, au moins pour un temps, au
regard des prceptes de la bonne sant. Ce dfaut d’intgration des normes
prventives, que la recherche mesure et qualifie, trouve ainsi son pendant
populaire : il nous faut regarder ce monstre, celui qui sait, mais
ne sait pas mobiliser son savoir. Barry Adam le souligne dans ces termes :
le sida a merg comme maladie de l’autre et rien ne permet de dire que ce
schma initial ait boug en trente ans ; le binarisme qui spare soi-mme
de l’autre, l’observ de l’observateur, le responsable de l’irresponsable,
demeure opratoire quant au sens que nous attachons la transmission du
VIH 2. Si l’inclusion de l’homosexualit, sinon sa valorisation,
tend prendre le pas sur l’abjection, il n’en reste pas moins que mille
situations sont associes couramment son dfaut premier, cette vulnrabilit
propre : la prise de drogues, la rmunration des relations, la
compulsivit de l’activit sexuelle, jusqu’ la situation de couple, pourtant
promue par les Etats, et notablement promue pour ses effets protecteurs.
Ce sujet pris en dfaut est celui qui ne correspond pas, ou jamais
suffisamment, au sujet type de la sant publique, qui, inform des risques, doit
agir de manire les minimiser, sinon les viter.
Les
journes proposes s’attachent caractriser la production discursive de ce
sujet. Elles prennent place dans un temps o l’on attend des tudes
quantitatives, des enqutes de prvalence ou d’incidence qu’elles fournissent
les clefs permettant d’inflchir les courbes de l’pidmie. Elles prennent
place galement dans un temps o l’approche biomdicale de la prvention
est croissante, qu’il s’agisse de considrer le rle prventif du traitement des
personnes sropositives ou le traitement prophylactique des personnes
srongatives. Elles prennent place enfin dans un temps o la responsabilit des
sujets est dmultiplie : responsabilit de chacun chaque acte
sexuel, mais aussi responsabilit de ceux qui ne connaissent pas leur statut
srologique de se faire dpister et responsabilit des sropositifs de
maintenir indtectable leur charge virale 3. Que cette responsabilit
soit ainsi dmultiplie porte en saisir plus justement son pendant :
n’est-elle pas la catgorie juridique par laquelle les Etats diffrencient
les coupables des innocents 4 ? L’autre, mais aussi soi-mme,
qui porte cette responsabilit (de ne pas transmettre, de ne pas s’exposer, de
ne pas faillir dans sa dmarche prventive ) se voit de manire
croissante somm, par injonction contradictoire, de justifier son dfaut de
rationalit. Finalement, ces productions catgorielles par lesquelles individus
et comportements sont qualifis et mesurs, feraient-elles sens sans la
supposition d’une intentionnalit, catgorie souvent aveugle dont il s’agit
de mieux cerner les effets ?
1 Michael Scarce, « The second wave of the gay men’s health movement:
medicalization and cooptation as pitfalls of progress »,
Journal of the gay an lesbian medical association, 2000
2 Voir ce sujet Barry Adam, « Infectious behavior: imputing
subjectivity to HIV transmission », Social theory & health,
2005
3
Voir
ce sujet CNS, Avis sur l’intrt du traitement comme outil novateur de
la lutte contre l’pidmie d’infections VIH ,
2009
4 Voir ce sujet David Halperin, What do gay men want?,
2007
Reid
Hall, Universit de Columbia – 4 rue de Chevreuse, 75006
Paris
Mtro
: ligne 4, station Vavin, Bus : 91, 68, arrt Vavin
Un verre est
offert aux participants jeudi 24 juin partir de 19h30 par le Freedj, 35, rue
Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, 75004 Paris ; Mtro : ligne 1, station
Htel de Ville.
Sidaction
remercie le Reid Hall et le Freedj pour leur soutien.
Inscriptions
auprs de Vincent Douris : v.douris@sidaction.org
Sidaction
228, rue du
Faubourg Saint Martin
75010
Paris