Jusqu’à ce dimanche, le pasteur de l’Oratoire du Louvre à Paris accompagnait les couples homosexuels mariés civilement à sa manière. Il les bénissait dans le privé. Marc Pernot ne pouvait leur offrir une bénédiction publique au temple interdite par leur Église. Créée en 2013, par le « mariage » des luthériens et des réformés, l’Église protestante unie de France (Épudf) s’est réunie dimanche à Sète (Hérault) pour trancher cette épineuse question. Au terme d’une réflexion qui a commencé il y a dix-huit mois dans les paroisses, l’assemblée synodale a adopté la possibilité pour les pasteurs de bénir officiellement ces unions. « J’ai un couple qui attend la réponse du synode pour organiser un cérémonie », confiait Marc Pernot. Les pasteurs protestants de l’Epudf, qui représente 30 % de la Fédération protestante de France, ne sont pas tous aussi progressistes que lui.
Les protestants « classiques » face aux évangéliques
À quelques rues de là, Gilles Boucomont, pasteur du temple du Marais, est, pour sa part, hostile à cette bénédiction. Très actif dans les réseaux sociaux, le pasteur Boucomont était devenu le porte-étendard des opposants. « Ils sont sans aucun doute minoritaires mais ils sont très déterminés », analyse un porte-parole de l’Epudf.
Samedi soir, les quelque 150 participants du synode cherchaient encore un consensus. « Il y a beaucoup d’écoute, de compréhension entre les représentants synodaux, expliquait en fin de journée au JDD le président de l’Epudf, Laurent Schlumberger. Je suis confiant sur l’adoption d’un texte commun mais je ne suis pas capable de me prononcer sur sa nature. » Les protestants se sont donc acheminés vers un « oui mais ». Les pasteurs qui comme Marc Pernot souhaitent bénir les mariages homosexuels pourront le faire. Les autres n’auront aucune obligation de répondre aux demandes des fidèles. « Depuis 1958, les pasteurs qui ne baptisent que les adultes, explique l’un des deux rapporteurs du synode, l’historien Frédéric Rognon, ne sont pas tenus de baptiser les enfants. En revanche, ils doivent trouver une solution pour répondre aux croyants qui les sollicitent en les confiant au pasteur d’une autre paroisse, par exemple. »
Les vifs débats provoqués dans la société sur l’adoption du mariage pour tous en 2013 ont pesé sur le synode. Les Églises luthérienne et réformée ont repoussé le sujet car elles étaient attachées à réaliser leur unité. « À l’époque, les questions sensibles avaient été mises sous le tapis », regrette un farouche partisan de la bénédiction. L’Église protestante « classique » était également confrontée aux positions tranchées des évangéliques et des pentecôtistes, opposés à cette bénédiction.
Source : Le JDD